normalement. Dans cette lutte pour l’existence, les organismes inoffensifs triomphent de ceux qui ne le sont pas et nous en débarrassent. Sans cette destruction incessante des microbes pathogènes, toutes les eaux en seraient tellement chargées qu’on ne pourrait plus les boire sans danger.
Il ne suffit pas, ai-je dit, d’avoir de bonne eau à sa disposition ; il faut encore qu’on puisse en user largement, et même la gaspiller, pour les usages de la vie domestique. La santé est à ce prix. Cette condition est aussi difficile à remplir que la première. L’hygiène a singulièrement accru ses exigences depuis qu’elle est sûre de marcher dans la bonne voie. En 1789, Paris distribuait à sa population 13 litres d’eau par jour et par tête, et personne ne se plaignait ; il en délivre 300 aujourd’hui, et nous ne trouvons pas que ce soit assez. Paris est cependant une des villes du monde les plus favorisées. M. Bechmann, dans un livre publié en 1888, a donné le tableau de l’alimentation en eaux potables des 84 plus grandes villes de France et de l’étranger. La moyenne est de 185 litres d’eau par jour et par tête. Les deux termes extrêmes de cette é numération sont deux capitales : Rome, qui distribue chaque jour 1 000 litres d’eau à chacun de ses habitans, et Madrid qui n’en donne que 15 à chacun des siens.
On admet aujourd’hui que, pour les grands travaux d’approvisionnement à entreprendre, il faut calculer sur 200 litres d’eau par jour et par tête. Ce chiffre représente une moyenne. Il est trop faible pour les grands centres de population dans lesquels l’eau est un luxe, et les petites localités sont souvent forcées de se contenter à moins. Les exigences ne sont pas les mêmes dans les deux cas. Les grandes villes doivent distribuer l’eau dans les maisons, dans les rues et dans les usines ; c’est ce qu’on appelle, en langage technique, le service privé, le service public et le service industriel. Le premier comprend l’alimentation et les usages culinaires, le lavage de la vaisselle, des vêtemens, des appartemens, des escaliers et des cours, la salle de bains, les water-closets et le jeu des ascenseurs. Le second correspond au lavage des ruisseaux et des égouts, à l’arrosage des chaussées, trottoirs, pelouses et jardins publics : à l’alimentation des fontaines, des établissemens de bains, des water-closets publics, des piscines de natation et des bouches d’incendie. Le troisième fournit l’eau à toutes les industries qui l’emploient comme dissolvant ou comme véhicule (sucreries, teintureries, etc., etc.), comme matière première (brasseries, fabriques d’eaux minérales), comme moyen de lavage ou comme force motrice. La plupart de ces usages sont inconnus des petites villes : elles ont donc besoin d’une quantité