entre les membres est la principale cause de l’insuccès de ces associations communistes : le despotisme des trustees organisé par les règlemens a été tempéré par de petites révolutions ; telle communauté a eu quatre présidens en quinze mois ; rarement les trustees sont arrivés au terme de leur mandat. Souvent on ne s’en est pas tenu aux discussions, mais des rixes, des agressions ont eu lieu sans qu’on pût obtenir le châtiment des coupables. « Votre agresseur a-t-il été puni ? demande-t-on à un trustee du village de Holder, assailli pendant qu’il travaillait. — Non. Beaucoup de villageois croient que la justice ne peut les atteindre ici et qu’il n’y a aucun recours. — Pensent-ils donc qu’ils peuvent commettre des agressions ou même des meurtres impunément ? — Oui. — Pourquoi ne vous êtes-vous pas plaint, conformément au règlement ? — J’ai été attaqué par un autre trustee, et j’aurais eu trois trustees sur cinq contre moi. » Le même témoin raconte qu’un villageois ayant été assailli et ayant eu un membre brisé, les trustees ont décidé son expulsion, mais l’assemblée générale a refusé de la voter ; nombreux ont été les autres cas de violence dans ce village ; partout il y en a, du reste, et partout la justice est aussi boiteuse. À Lyrup, ce sont des vols qui restent impunis, quoique les voleurs eussent été arrêtés. Les expulsions très nombreuses semblent, au contraire, avoir été prononcées pour des motifs futiles, parce que certains membres ne partageaient pas la manière de voir du parti dominant. Les départs volontaires ont été plus fréquens encore ; l’un des villages n’a plus que 9 membres au lieu de 23 ; un autre s’est scindé en deux portions, qui n’ont ensemble que 49 membres au lieu de 67 à l’origine ; un troisième est tombé de 100 à 65.
L’expérience a donc été triste, mais concluante. En présence de l’impossibilité d’obtenir un travail régulier et de maintenir l’ordre dans ces communautés, dont la plus vaste ne compte pourtant que 100 associés et 350 habitans en tout, il s’est formé dans chacune d’elles un parti individualiste, composé surtout de ceux qui ont quelque connaissance de l’agriculture, tandis que les anciens ouvriers des villes, les mechanics, restent en grande partie communistes. « J’étais un partisan de la coopération socialiste, déclare un témoin, mais, depuis, j’ai passé six mois ici ; le régime actuel ne vaut rien. » Et de toutes parts des villageois déclarent que le système est pourri, que jamais on ne réussira dans cette voie, que l’application de la journée de huit heures est absurde. « Etiez-vous communiste quand vous êtes arrivé ici ? demande-t-on à l’un des habitans du village de Pyap. — J’étais un grand partisan de la terre pour le peuple (the land for the