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concerne la viande de bœuf, qui n’est produite sur une grande échelle que dans l’Australie tropicale ou semi-tropicale, dans le Queensland et le nord de la Nouvelle-Galles. La première de ces colonies exportait néanmoins 161 000 quintaux de bœuf gelé en 1895 au lieu de 20 000 seulement en 1891, et la seconde 63 00 au lieu de 400 quatre ans plus tôt. Elles commencent à faire concurrence sur le marché anglais aux exportations similaires des États-Unis, qui oscillent entre 800 000 et un million de quintaux par an.

Cette concurrence même que se font l’Australie et les deux Amériques tend, toutefois, à réduire les prix de vente à un niveau qui ne laisse plus aux éleveurs qu’un bien faible profit. La viande gelée se vend toujours beaucoup moins cher que la viande fraîche, parce que l’opération du dégel, malgré tous les perfectionnemens qu’on a cherché à y apporter, lui laisse un aspect peu agréable et lui fait perdre une partie de ses qualités : le mouton australien ou néo-zélandais ne valait ainsi à Londres, l’été dernier, que 35 à 40 centimes la livre, alors que le mouton anglais ou écossais se payait en gros 60 à 65 centimes. Le fret, qui était d’environ 20 centimes, il y a quelques années, n’est plus que de 10 aujourd’hui ; les dépenses de congélation et d’embarquement faites dans la colonie sont d’environ 4 centimes ; en y ajoutant les frais d’assurance et ceux qu’il faut encore faire à Londres, on arrive[1] à un total de 20 centimes de dépense pour amener de Nouvelle-Zélande sur le marché anglais une livre de mouton qui se vendra environ 40 centimes. On considère cependant dans la colonie que les 20 centimes restant suffisent à rémunérer convenablement l’éleveur, bien qu’il doive amènera ses frais le mouton de sa propriété au port d’embarquement ; mais il ne faudrait pas que les prix éprouvassent une plus forte baisse. Les compagnies qui possèdent les freezing-works et qui achètent aux propriétaires sont elles-mêmes en relation avec des maisons de Londres, à qui elles expédient à intervalles fixes un nombre déterminé de moutons, de façon à éviter les alternatives d’encombrement et d’insuffisance du marché. Ce sont les produits accessoires, suif et autres, qui constituent la plus grande partie des bénéfices de ces compagnies. Certaines maisons anglaises très importantes possèdent elles-mêmes des freezing-works dans les colonies et achètent du bétail directement aux éleveurs, aussi bien qu’aux compagnies secondaires. C’est la grande échelle sur laquelle est organisée l’industrie de la congélation, aussi bien que l’élevage lui-même,

  1. D’après le New Zealand official Year Book.