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pourtant le travail n’est pas abrité en France d’une façon effective par des lois protectrices. Nous attendons encore l’équivalent du Factory and Work-Shops act qui régit les industries anglaises, et nous en sommes réduits à la loi de 1874 qui ne vise que le travail des enfans et des femmes. Mais si ces conditions relatives d’infériorité n’ont pas encore permis de conduire aussi loin qu’on peut le souhaiter l’assainissement industriel en général, il n’en existe pas moins aujourd’hui des usines, des manufactures installées dans des conditions voisines de la perfection. Ouvrons les livres d’hygiène de Proust, de Rochard, de Ch. de Freycinet, de Napias, de A.-J. Martin, et nous serons édifiés. N’a-t-on pas assaini d’une façon complète les industries si meurtrières du plomb, la préparation de la céruse, du minium en substituant la voie humide à la voie sèche ? et celle de l’arsenic et des préparations arsenicales ? la fabrication du caoutchouc, etc. L’industrie du verre exposait les ouvriers à plusieurs ordres de dangers : le broyage de la silice et des substances colorantes, presque toutes toxiques, répandait des poussières délétères ; les opérations du soufflage à la bouche, outre qu’elles étaient très périlleuses au point de vue de la contagiosité des maladies infectieuses, étaient cause de lésions pulmonaires, telles que la dilatation des bronches, l’emphysème. Tous ces dangers ont disparu. Il en est de même de ceux qu’offrait hier encore une autre industrie ; c’est l’industrie de la fabrication du phosphore. Elle était jadis tout à fait meurtrière. Il a suffi d’une modification dans la technique et d’un certain travail « sous l’eau » pour en modifier totalement les conditions et pour l’assainir complètement.

Mais nous n’avons pas à développer ici les différens moyens mis en œuvre pour réaliser ces résultats : l’art de l’ingénieur y a consacré toutes ses ressources : systèmes d’aération subordonnés à la nature et à la densité des poisons, ventilation mécanique par machines, avec énergie proportionnelle ; méthodes par aspiration, par refoulement, par injection d’air, etc. ; neutralisation de certains toxiques ; protection de l’ouvrier par des moyens spéciaux, des masques, des appareils clos ; substitution des machines à l’intervention manuelle, élément considérable d’assainissement que nous retrouverons plus tard.

En un mot, grâce à une infinité de procédés variés ou gradués suivant les cas particuliers, on peut dire qu’à l’heure actuelle les industries restées malsaines sont en infime minorité. Pourquoi