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nécessité et de son efficacité, et parmi lesquels Scharnweber était le plus ardent et le plus tenace.


LA REFORME AGRAIRE
I

Hardenberg et Stein s’étaient, dès l’origine du mouvement de réforme en Prusse, accordés sur bien des points, et cet accord ne paraît pas s’être rompu dans l’entrevue mystérieuse de septembre 1810 où Hardenberg, premier ministre, avait été chercher les conseils et l’assentiment de Stein proscrit.

L’accord paraissait notamment s’être fait dès le début sur l’introduction en Prusse du régime représentatif. C’était là une de ces promesses retentissantes que contenaient les édits de Hardenberg. Stein, qui n’avait pas été plus ménager que Hardenberg de grandes promesses et de manifestations sans sanction, lui avait légué celle-là, entre beaucoup d’autres, dans son testament politique[1]. Hardenberg l’avait recueillie dans son édit du 27 octobre 1810. Seulement la promesse était demeurée vague et ni l’un ni l’autre des hommes d’Etat prussiens ne paraît y avoir attaché de sens bien précis[2].

Le régime représentatif est demeuré pour nous en France ce qu’il a été depuis le serment du Jeu de Paume. Nous voulons que la représentation détienne le pouvoir politique. L’Assemblée constituante l’a conquis de haute lutte, en 1789, dès les premiers jours de son existence, et, depuis, nous n’avons jamais considéré sans quelque mépris les assemblées qui n’ont point possédé la réalité du pouvoir. Les Allemands ne sauraient avoir la même conception du système représentatif. Le régime parlementaire est établi en Prusse depuis quarante ans, et le suffrage universel admis en Allemagne depuis vingt ans. L’autorité monarchique ne s’est jamais encore heurtée au suffrage universel : elle s’est trouvée plus d’une fois en conflit avec le Parlement. Mais, dans ces conflits, elle n’a rien perdu de ses prérogatives. Lorsqu’en 1810 Stein et Hardenberg parlaient de constitution nouvelle et

  1. Pertz, Das Leben des Ministers Freiherrn vom Stein, II, p. 311.
  2. A. Stern, Abhandlungen und Aktenstücke zur Geschichte der preussischen Reformzeit, 1807-1815, VII. Geschichte der preussischen Verfassungsfrage, 1807-1815, pp. 1 45 et suiv.