Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 140.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cabinet de Munich estimèrent que cette même lettre du Prince impérial était un chef-d’œuvre diplomatique. Ils firent ressortir la signification du passage de cette lettre qui rappelait que le Vatican a su se montrer en maintes circonstances conciliant envers d’autres États que la Prusse. « Dès lors », continuaient les publicistes qui avaient adopté cette thèse, « il est à espérer qu’en dépit des ombres fâcheuses que la lutte des partis jette sur la situation intérieure, les manifestations de la glorieuse omnipotence acquise à l’Allemagne, pour ce qui concerne la politique étrangère, porteront le prudent et conciliant Léon XIII à fléchir. »

Puis, d’un télégramme de Rome annonçant que Mgr Aloysi serait chargé de s’entendre avec le gouvernement prussien pour sauvegarder les intérêts des populations catholiques dans plusieurs diocèses vacans, on concluait qu’entre le Vatican et Berlin une entente était déjà intervenue dont il ne restait plus qu’à régler les détails. Cette tâche impliquait cependant une responsabilité très grave, les titulaires des sièges de Cologne, de Posen et Gnesen, de Breslau, de Munster, de Paderborn et de Trêves ayant été déclarés déchus de leurs droits, tandis qu’il n’avait pas été pourvu au remplacement des évêques de Fulda, de Limbourg et de Mayence, décédés.

Le 2 juillet, la réponse du Pape à la lettre du Prince impérial arriva au nonce de Munich qui put en communiquer la copie au ministre de Prusse, baron de Werthern. Le Saint-Siège accentuait son désir, que les négociations qu’il était prêt à entamer eussent lieu à Borne, tandis qu’au contraire le prince de Bismarck, auquel on attribuait l’idée fixe non seulement de ne pas aller à Canossa, mais même de ne pas paraître y aller en envoyant un négociateur sur les bords du Tibre, persistait dans la prétention que l’arrangement qui devait mettre fin au conflit fût discuté à Berlin par un mandataire du Souverain Pontife. M. de Werthern insistait donc beaucoup pour que Mgr Aloysi ne tardât pas à entrer en rapports directs et personnels avec le prince de Bismarck, qu’avait beaucoup touché la pensée du nonce de lui faire donner en temps utile connaissance à titre confidentiel de sa mission à Dresde.

Les choses en étaient là lorsque, le 16 juillet, le comte Holnstein vint informer le nonce que le Chancelier, qui était sur le point de se rendre à Kissingen, se féliciterait beaucoup d’y avoir une entrevue avec lui. Mgr Aloysi, ayant sollicité aussitôt des