la force de l’éducation, jusqu’ici, a été dirigée de toutes les façons possibles vers la destruction de l’amour de la Nature. La seule connaissance qui a été considérée comme essentielle parmi nous est celle des mots, et après celle-là, celle des sciences abstraites, tandis que tout goût montré par les enfans pour la simple histoire naturelle a été soit violemment réprimé (s’il apportait quelque trouble dans la maison) soit scrupuleusement limité aux heures de jeu, — de telle sorte que l’amour de la Nature est devenu l’apanage des vagabonds et des paresseux. En même temps, l’art de dessiner qui est d’une plus réelle importance pour la race humaine que celui d’écrire — car les gens peuvent difficilement dessiner quelque chose, sans être de quelque utilité aux autres et à eux-mêmes, et peuvent difficilement écrire quelque chose sans perdre leur temps et celui des autres, — cet art du dessin, qui devrait être enseigné aux enfans, comme on leur enseigne l’écriture, l’est fort mal. «
Il faudrait d’abord cultiver chez les enfans la faculté d’admiration. « Si les botanistes ont découvert quelque rapport merveilleux entre les orties et les figues, c’est très intéressant, mais un jeune vacher fera bien mieux d’apprendre quel effet les orties produisent dans le foin, et quel goût elles donnent à la soupe. De plus, il acquerra presque une nouvelle vie, s’il peut parvenir une fois au printemps à regarder le bel anneau de la fleur blanche de l’ortie et à reproduire, au crayon, avec son maître d’école, les courbes de ses pétales et la manière dont elle est posée sur sa tige centrale. On devrait dire aux écoliers des écoles primaires : Dessinez telle ou telle plante avec son contour, avec sa clochette vue de face... Bien! maintenant, vue de profil. Peignez les taches qui sont sur elle. Dessinez la tête d’un rouge-gorge, sa poitrine et les taches qui sont sur la poitrine du rouge-gorge. Au lieu de cela, on leur décrit ce qu’a l’oiseau dans l’estomac... On ne leur fait pas admirer la finesse des nuées et des mousses : on leur raconte ce que font l’air dans les chaudières et les fibres textiles sur les métiers... Enfin on s’occupe de leur instruction, mais nullement de leur éducation, car donner l’éducation à un enfant, ce n’est nullement lui apprendre quelque chose qu’il ne savait pas, mais faire de lui quelqu’un qu’il n’était pas. Et le commencement de toute éducation est l’admiration, le respect, l’enthousiasme... Pour quoi? Pour n’importe quoi! Que l’enfant adore des cailloux ou des légumes, si vous n’avez pas d’autres dieux à proposer à