elle est restée immobile sur ses positions, au moins pendant quelques jours, afin de bien marquer que la première provocation n’était pas venue de son côté. Puis, le feu a pris partout à la fois; la guerre a éclaté, et il importe assez peu de savoir par qui la déclaration officielle en a été faite, car, dans la conscience universelle, celui-là en est moralement l’auteur qui l’a rendue inévitable.
Les hostilités ont été ouvertes, et dès les premiers jours, en dépit des dépêches optimistes qui venaient d’Athènes, il a été sensible que la supériorité militaire était du côté des Turcs. Cela n’a surpris personne. Nous avons déjà parlé des conditions dans lesquelles s’est faite la concentration de l’armée ottomane sur la frontière de Macédoine et de Thessalie Quand même on n’aurait pas su que la main allemande dirigeait tous ces ressorts compliqués, on l’aurait reconnue à sa manière de procéder. Les Turcs, livrés à eux-mêmes, auraient été incapables d’une aussi grande perfection de méthode. Tout ce qui tient au problème même de la mobilisation s’est trouvé prévu et réglé d’avance, et l’exécution a eu lieu dans des conditions précises qui feraient honneur à une armée européenne quelle qu’elle fût. Ce n’était pas une tâche facile que de transporter, dans un temps donné et le plus court possible, les troupes ottomanes des points les plus reculés de la Turquie d’Asie jusqu’à la frontière turco-grecque. Les ressources que l’empire pouvait offrir en moyens de locomotion, soit sur terre, soit sur mer, y ont été habilement employées, et l’armée turque présentait déjà en Macédoine une accumulation de forces considérable, lorsque de l’autre côté de la frontière, dans la Thessalie hellénique, il n’y avait encore qu’un noyau militaire tout à fait inférieur. Si la guerre avait éclaté quelques semaines plus tôt, l’armée ottomane aurait pu surprendre l’armée grecque en flagrant délit de formation.
Elle ne l’a point fait; elle a laissé à son adversaire le temps de se renforcer; et ici, après avoir rendu à l’armée ottomane et à ses conseillers la justice qui leur est due, il nous faut constater que les efforts des Grecs ont dépassé, en rapidité et en efficacité, tout ce qu’on pouvait en attendre. Leur petite armée a été à peu près quadruplée en quelques jours par l’afflux des réserves, et ses cadres, dont la résistance s’est trouvée mise à une rude épreuve, sont restés solides sous le surcroît de charge qu’ils ont eu à supporter. Ce phénomène, car c’en est un, ne peut s’expliquer que par l’ardeur patriotique dont l’armée grecque était animée et qui lui fait le plus grand honneur. Mais, malgré leur courage, les Grecs ne pouvaient pas vaincre la difficulté qui résultait pour eux d’une disproportion de forces aussi considérable : la