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de cotonnade, comportait, pour les filles les plus coquettes, des dentelles assez jolies quoique communes. Mais la femme provençale se signalait surtout par son énorme chapeau de feutre noir, à larges ailes et orné d’un ruban ; elle s’en coiffait quotidiennement, se contentant, les jours de fête, de substituer au chapeau ordinaire un couvre-chef moins fané. Un tablier et de gros bas bleus complétaient l’ajustement. L’été, des jupons de toile rayée remplaçaient les chaudes jupes de drap.

Les jours fériés, ou lorsque les paysannes venaient en ville, elles arboraient un manteau à capuchon, en indienne parsemée de fleurs, sur un fond noir. Ces manteaux, assez gracieux, se fabriquaient dans le pays et sortaient de la ville d’Aix, qui n’a cessé d’en produire qu’au milieu du règne de Louis-Philippe.

Vers cette même époque, les villageoises mariées et jouissant de quelque bien-être cessèrent de porter à leur cou le joyau appelé « papillon », en usage, dit-on, depuis l’époque du roi René. C’était une sorte de croix d’argent, d’aspect assez artistique, ornée de pierres fausses ou de médiocre valeur. Elle reposait sur le sein, portée par un ruban de velours noir que maintenait un coulant en argent plaqué d’or.

La culotte courte disparut en même temps que la croix. Elle comportait l’adjonction de guêtres en peau, remontant jusqu’au dessus du genou. Les fermiers les plus cossus préféraient arborer, au moins le dimanche, des guêtres de drap noir. La blouse ou le bourgeron étaient moins en usage qu’une assez longue veste que l’homme jetait sur ses épaules, les manches pendantes, et dont il ne se couvrait qu’en visite ou à l’église.

Lorsqu’on pénètre pendant les offices dans les églises de village, bien moins garnies qu’autrefois, on distingue ordinairement, dans le recoin le plus sombre, quelques vieux septuagénaires édentés, à figure ratatinée, coiffés d’un bonnet de coton qui leur couvre les oreilles. Ce détail de costume indique les derniers vestiges d’une mode disparue : autrefois, en effet, les paysans du sud-est usaient volontiers de la traditionnelle coiffure du bon roi d’Yvetot, blanche, bleue ou rouge, unie ou rayée. L’emploi de la « taïole » s’est maintenu plus longtemps. On nomme ainsi une large ceinture de laine de couleur, qui enlace la taille par-dessus le gilet.

Quoique jamais les Provençaux d’Aix, répétons-le encore, n’aient passé pour riches, cependant un indice d’aisance bien