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« Après cette première entrevue (la réception que nous avons racontée), Mme de Maintenon l’amenoit presque tous les jours. Elle l’exerçoit auprès d’elle, ou lui faisoit suivre les classes, ce qui ne déplaisoit pas à l’auguste enfant. Elle avoit parmi elles de petites amies avec lesquelles elle lioit davantage, quoy qu’elle agît bien avec toutes, étant du naturel le plus affable et le plus gracieux du monde. Tout annonçoit en elle la supériorité du rang. A la plus aimable figure elle joignoit un air de vivacité qui inspiroit la gaieté aux demoiselles. »

Parmi ces petites amies avec lesquelles elle liait davantage, se trouvait Mlle d’Aubigné, qui devait être un jour la maréchale duchesse de Noailles. Les deux jeunes filles s’aimaient beaucoup, ce qui ne les empêchait pas de se disputer assez souvent. « Un jour qu’il y avoit eu entre elles une petite fâcherie, et qu’elles s’étoient même un peu battues, il arriva qu’on annonça à la Princesse que c’étoit pour elle jour de confession, et que le Père Lecomte, jésuite, son confesseur, envoyoit savoir l’heure de sa commodité. Mlle d’Aubigné, entendant cette invitation, la regarda avec un air malin et lui dit : « Oh ! que la conscience me poigneroit si c’étoit moi que l’on demandoit pour aller à confesse ! » La Princesse rougit et ne répondit rien. Elle tint sans doute grand compte de ce reproche sous-entendu, mais il n’est pas certain qu’elle en profita pour être plus douce une autre fois.

Bien que les jours où la Princesse venait à Saint-Cyr fussent toujours un peu des jours de fête, cependant Mme de Maintenon tenait à ce que la régularité apparente de la maison ne fût pas troublée, et que les exercices se continuassent comme à l’ordinaire. La Princesse s’y prêtait de bonne grâce. Elle prenait, ces jours-là, le nom de Mlle de Lastic, une élève récemment sortie, et revêtait même le costume de la maison. Peut-être ne sera-t-on pas fâché de savoir quel était ce costume. Laissons les dames elles-mêmes nous le décrire : « L’habit des demoiselles consiste en un manteau et une jupe d’étamine brune du Mans, et le reste à l’avenant. La coiffure est un bonnet de toile blanche, avec une étoffe médiocrement fine ou une passe de mousseline et de linon ; elles ont un ruban sur la tête, montrent des cheveux et se coiffent à peu près suivant l’usage du temps. Elles ont un bord de