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Enfin le 17, les fêtes se terminèrent par la représentation au théâtre de Trianon de l’opéra d’Issé, pastorale héroïque en trois actes, dont les paroles étaient d’Houdar de la Motte et la musique de Destouches, compositeur goûté particulièrement par le Roi. Les décors et les costumes avaient été dessinés par Berain.


Ainsi se trouvaient définitivement unis ces deux jeunes êtres si différens l’un de l’autre dont nous avons successivement raconté l’enfance et l’éducation ; l’un passionné, mais contenu, déjà grave, malgré ses quinze ans, et gouverné avant tout par la conscience, la piété et le sentiment du devoir ; l’autre, de nature sensible, affectueuse, mais gaie, légère, ardente au plaisir. Ces différences n’échappaient pas aux observateurs sagaces. En particulier, Nicolo Errizo, l’ambassadeur vénitien, les signalait au Sénat de Venise dans une curieuse relation. Après avoir parlé du duc de Bourgogne, comme d’un prince studieux, avide de s’instruire de toutes choses, d’un naturel ardent, et de la duchesse, comme d’une princesse que la nature avait douée d’un esprit très vif, mais avec laquelle elle avait été économe en beauté (scarsa in bellezza), il ajoutait, après avoir annoncé leur prochain mariage : « Il est à croire que les années rapprocheront ces esprits qui, jusqu’à présent et à cause de leur jeune âge, n’ont pas été moins séparés que leurs personnes (non men che le loro persone disgiunti)[1].

Dans une seconde série d’études, nous raconterons un jour comment, après une période de mésintelligence passagère, ces deux natures qui se ressemblaient en effet si peu furent réconciliées par l’épreuve, avant qu’une tragédie suprême ne les réunît dans la mort.


HAUSSONVILLE.

  1. Relazioni degli stati Europei lette al Senato dagli ambasciatori Veneti nel secolo decimosettimo raccolte ed annotate da Nicolo Barozzo e Guglielmo Berchet. — Francia, I. III, p. 585.