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de race hellénique ou qu’elles soient antérieures à cette date, ceux qui les creusèrent ont subi, dans une certaine mesure, l’influence de la civilisation étrangère avec laquelle ils étaient entrés déjà ou allaient bientôt entrer en contact direct. La chambre n’a plus, en général, la même forme ; elle est plus souvent rectangulaire que ronde. Quelquefois elle n’a été faite que pour une seule personne, et elle ne renferme guère, au maximum, que quatre à cinq corps. Ceux-ci ne s’y montrent plus dans la posture étrange que nous avons décrite. Des banquettes ont été ménagées dans l’épaisseur de la paroi, qui se terminent à l’une de leurs extrémités par une sorte d’oreiller, et le squelette y repose, allongé dans la position du sommeil ; le cadavre a dû être déposé là dans son état naturel. Pourquoi aurait-on pris la peine de préparer ces lits de pierre, sinon pour y coucher, tels que la mort les avait faits, les chefs de la tribu ou de la famille ? Si, d’ailleurs, dans ces sépultures, les couteaux de silex font défaut et si les vases que l’on y recueille trahissent, par leur décor, l’imitation de modèles grecs, c’est toujours la même idée qui a présidé au choix et à la distribution des pièces du mobilier funéraire ; il s’agit toujours de désaltérer et de nourrir le défunt, de le défendre contre un rapide et complet anéantissement. Il a été ramassé dans quelques caveaux d’informes maquettes de terre cuite où l’on croit deviner l’intention d’imiter la figure humaine ; elles ressemblent à celles, de même matière, que renferment les tombes mycéniennes ; mais elles sont plus grossières encore. Peut-être faut-il y voir, comme on l’a fait pour les simulacres découverts en Argolide, des idoles, les images de divinités auxquelles était confiée la protection du sépulcre et de ses hôtes silencieux. De ces remarques, il résulte que la tombe sikèle, avec moins de complication et de luxe, est fort semblable à la tombe grecque primitive, qu’elle traduit les mêmes pensées et les mêmes inquiétudes. La différence, c’est que l’esprit des Sikèles n’a pas travaillé comme celui des Grecs. Les Sikèles s’en sont tenus à la solution du problème qu’ils avaient tout d’abord adoptée ; ils n’ont, par suite, introduit dans leurs rites funéraires que des changemens sans importance. Jamais ils ne sont arrivés à pratiquer l’incinération.

En esquissant l’histoire de la tombe sikèle, nous avons déjà fait pressentir de quels commencemens est partie et dans quel sens s’est développée l’industrie de ces tribus. Dans cette évolution, M. Orsi distingue trois périodes, dont chacune est