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Toi que hante, à cette heure, un souvenir mortel,
Regarde ces vaillans et prends-les pour exemple.
Dépouille ton orgueil à la porte du temple ;
Agenouille ton cœur devant le pur autel.

Le chagrin qui t’oppresse est pareil aux mouettes
Qu’emporte sur la mer le vent qui rajeunit.
Puisses-tu, délivré des pièges du Maudit,
Redevenir enfant avec les alouettes !

Vois ! La sainte Bretagne a pour toi revêtu
Sa parure d’ajoncs, son manteau de bruyères.
Un esprit bienfaisant respire dans ces pierres ;
De ces mille fleurs d’or s’exhale une vertu.

C’est un rêve d’argent qui bat le pied des roches ;
D’angéliques parfums s’élèvent du ravin ;
Et, comme un frais écho du royaume divin,
Dans l’azur infini passe le chant des cloches.

mon fils, c’est ici la terre de beauté,
C’est le pays d’amour où le soleil se couche.
Si quelque chant léger s’envole de ta bouche,
Qu’il soit fait d’innocence et de simplicité ! » —

— « Ainsi-soit-il ! » pensai-je, et soudain je m’éveille..
Qu’est-ce donc ? À ma porte apparaît un jour cru.
Avec sa barbe d’or l’évêque a disparu,
Mais son accent breton m’est resté dans l’oreille.

O bonhomme Héloury, vous enseignez l’amour.
La vertu du lit clos opère à sa manière.
Me voici désormais une âme printanière,
Une âme de granit… avec des fleurs autour.

C’est un cœur trégorrois qui bat dans ma poitrine,.
Un large cœur, sincère et droit, qui ne ment pas.
J’emplirai mes poumons du bon air de là-bas
Et je me fleurirai les yeux d’algue marine.