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moyen de s’en occuper au milieu des agitations de la cour, sous peine d’être importun et indiscret vis-à-vis de la reine. » Il aimerait cependant bien obtenir le règlement de ces affaires, afin de pouvoir quitter Paris avant la Pentecôte, époque fixée pour le départ de Madame. « La reine mère est d’ailleurs très contente des peintures de la galerie, ainsi qu’elle le lui a assuré mainte et mainte fois de sa propre bouche, et qu’elle le dit à tout le monde. » Le roi lui a aussi fait l’honneur de visiter la galerie. C’était la première fois qu’il venait dans le palais, et il a témoigné toute la satisfaction que lui causaient les peintures, ainsi que l’ont rapporté les personnes présentes[1], notamment M. de Saint-Ambroise « qui dans l’explication qu’il a donnée des sujets, en a imaginé des commentaires souvent très ingénieux, afin d’en masquer le véritable sens. » On avait, en particulier, fort approuvé le tableau de la Félicité de la Régence, fait pour remplacer la Reine quittant Paris, la donnée de ce tableau étant d’un caractère très général et ne pouvant froisser personne. « Je crois, poursuit Rubens, que si, au lieu du programme tracé par la cour, on s’en était entièrement rapporté à moi pour le choix des sujets, on n’aurait eu à craindre ni scandale, ni commentaires équivoques; ce dont, écrit-il en marge, le cardinal s’est avisé un peu tard, et il était fort en peine en voyant que les sujets nouvellement choisis étaient pris en mauvaise part. Je crains bien qu’à l’avenir, ajoute-t-il, je n’aie également des difficultés pour les sujets de l’autre galerie (celle d’Henri IV), et cependant, si on me laissait toute liberté, rien ne serait plus facile, la matière étant si abondante et si magnifique qu’elle prêterait à la décoration de dix galeries. Mais, bien que je lui aie exposé par écrit mes vues à cet égard, le cardinal est si absorbé par les affaires de l’Etat qu’il n’a pas trouvé le temps de me voir une seule fois. » Et à propos de la difficulté qu’à raison de ses incessantes occupations, il y avait à aborder le cardinal, Rubens, dans une autre de ses lettres[2], rappelle le mot d’un Espagnol qui, ayant adressé une requête à Philippe III, comme le roi alléguait que c’était là plutôt l’affaire du duc de Lerme, répondit que s’il avait pu obtenir une audience du duc, il ne se serait certainement pas adressé au roi. « J’en ai assez de cette cour, dit Rubens en terminant ; si je ne suis pas réglé avec la même ponctualité que

  1. Rubens était en ce moment retenu au logis par suite d’une douleur au pied occasionnée par une chaussure trop étroite.
  2. A. Du Puy, 22 octobre 1626.