supportant des humains qui me regardent curieusement. Et moi donc, j’ai ralenti l’allure de mon poney, j’avance à regret, emplissant mes yeux et ma mémoire. Auprès du petit campement abrité de quelques arbres se trouve un caravansérail : une cour carrée entourée de portes étroites et basses menant dans les niches des voyageurs ; un trou au fond sert de cheminée.
Il est midi, et tout là-haut, du monastère, le Gompa, qui domine le pays, on souffle longuement, dans de grandes cornes, l’appel des lamas à la prière. Le soleil darde cruellement ; je monte à pied en toute hâte, des hommes me conduisent ; et bientôt toute une procession me suit, aussi amusée de moi que je puis l’être d’elle. La femme blanche est déjà rare de ce côté. Tous les lamas, hommes et enfans, sont habillés de rouge, du grenat au rouge vif, quelquefois le bonnet est la seule note claire, bonnet découpé sur le front, très tombant en arrière et relevé en revers. Par-dessus la robe, à manches ou sans manches, ils portent une grande draperie. Ces groupes d’un rouge sombre et chaud sont superbes dans le soleil et les diversités de tons feraient le bonheur d’un peintre et d’un coloriste. Le peuple est habillé de laine blanc-poussière avec la ceinture marquante et tout l’outillage pendu. Il porte la longue natte, comme les Chinois, et des bottes à revers en tressage de cordes et de laines, véritables broderies avec semelles de cuir. Un groupe fait valoir l’autre.
Les femmes Ladaki portent des jupes froncées, faites de bandes verticales d’une étoffe de 20 centimètres de largeur, noir et rouge, bleu et rouge, vert et rouge ; leurs cheveux sont séparés en petites nattes, formant pèlerine, rattachées à un long gland qui tombe sur les talons. Une plaque de drap rouge, appelée peyrak, de douze à quinze centimètres de largeur, recouverte de turquoises, descend à la Marie Stuart sur le front et se prolonge en arrière sur les nattes jusqu’à la moitié du dos. Elles portent au côté le nœud gordien en cuivre et tout le flot des menus objets pendus : cuillère pour manger le satou (la farine), outils pour la toilette, clefs extraordinaires et le porte-monnaie aux longs flots de cauris, les coquilles-monnaies, qui sonnent en marchant. Les cheveux sont disposés de chaque côté du visage en minces nattes formant éventail, sur lesquelles sont fixées des oreillettes de fourrure noire éclairées d’un bouquet de roses jaunes derrière l’oreille.
Elles sont riantes et avenantes, et diffèrent absolument de la femme musulmane. Elles ont un air sûr d’elles, en femmes