pour septembriseur ; fanatique à ses heures, avec un fond de rouerie de conspirateur, une énergie d’insurgé et une verve de clubiste ; sans scrupules politiques, sans délicatesse sur l’article de l’argent, dissimulant sa ruse sous une apparence de rondeur démocratique ; fraternisant et extorquant tour à tour ; sachant attirer les gens, les captiver, encore mieux les dépouiller ; d’ailleurs intrépide quand il s’agissait de pousser une affaire, donner l’assaut, entraîner les hommes de la parole et de l’exemple, enfin un guerrier retors, fiscal et de belle allure révolutionnaire. Le 4 mars, il entra dans Berne, qui venait de renverser son gouvernement. Il saisit 5 millions en espèces, 18 millions de lettres de change et, le 22 mars, il proclama la République helvétique, une et indivisible, avec une constitution unitaire qui enveloppa dix-huit cantons, égaux en droits. Puis, comme il avait opéré avec quelque scandale, qu’il était insubordonné et qu’il montrait trop de dispositions à jouer le Bonaparte, le Directoire, n’osant le rappeler, le dépaysa et l’expédia en Italie. Brune laissa la Suisse assujettie au Directoire, mais bouleversée, pressurée, sous la domination d’une minorité de démocrates citadins, bourgeois, avec une constitution aussi contraire au génie de ses habitans qu’aux conditions géographiques du pays.
Tandis que, pour parler le jargon du temps, le Directoire vénétianisait ainsi l’Helvétie, il fructidorisait la Hollande. Les républicains bataves se montraient rétifs aux contributions, gémissaient sur la ruine de leur commerce, se lamentaient sur la perte de leurs colonies et n’exposaient qu’à contre-cœur leur belle flotte aux boulets anglais. Le Directoire, continuant la politique qui, de nécessité en nécessité, devait, en 1810, conduire à l’annexion totale, commanda un coup d’Etat, destiné, croyait-il, à lui assurer l’obéissance des Bataves. Joubert, émule de Bonaparte autant que de Hoche, fit ce jour-là, et magistralement, ses débuts dans la politique. Le 22 janvier 1798, les députés récalcitrans furent arrêtés ; le 17 mars la Hollande reçut une constitution à l’instar de celle de Paris. Elle eut un Directoire qui écrivit aussitôt au Directoire parisien : « Nos vaisseaux, nos équipages, nos trésors sont à vous. Disposez-en, menez les Bataves à la gloire ; punissez les fiers Anglais et rendez la paix au monde. »