Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 142.djvu/734

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
728
REVUE DES DEUX MONDES.

meilleur moyen de vaincre une coalition est de la dissoudre. La papauté se résolut à ménager un de ses deux adversaires pour avoir raison de l’autre. L’entente avec les clergés nationaux, alliance d’une force morale avec une force morale, n’eût pas garanti le Saint-Siège contre les entreprises de la puissance matérielle. L’entente avec les princes mettrait à la disposition de la papauté le bras séculier pour protéger au moins une partie des prérogatives pontificales et combattre les doctrines séparatistes des clergés nationaux. Celles-ci, étouffées entre la puissance morale dont le Saint-Siège disposait et la force matérielle qui appartenait au souverain, ne survivraient pas. Or là était l’essentiel. Si âpres et injustes que se montrassent les princes contre la papauté, eux se souciaient peu de théories : ils ne secouaient l’arbre que pour en avoir les fruits. Pourvu que le Saint-Siège se résignât en fait à une désuétude des prérogatives incommodes à leurs cupidités et à leur orgueil, la paix était certaine, et n’imposerait au pape aucune renonciation dogmatique à ses droits. C’était au contraire de principes qu’il s’agissait dans les désaccords entre lui et les Églises nationales. Si pures que fussent les intentions de ces Églises, leur défiance contre la papauté était le signe précurseur, le danger déjà commencé de l’unité rompue, le « crime contre l’esprit », la révolte de ceux qui ont la garde du temple, la semence de schisme.

Dès qu’échappée d’Avignon la papauté eut repris, avec la possession de Rome, la possession d’elle-même, ses desseins se fixèrent. Sans renoncer à aucun de ses droits, elle se fit, selon la manière dont ils étaient contestés, toute énergie ou toute patience. Chaque tentative poursuivie, au nom de la vérité religieuse et par des personnes ecclésiastiques, pour limiter les droits de Rome fut combattue avec une rigueur inflexible. À toutes les prétentions soutenues par les princes au nom de l’intérêt politique, Rome n’opposa que des réserves mesurées, discrètes, le plus souvent le silence, toujours un désir de paix. Cette paix cessait d’être garantie par la subordination universelle et constante de l’État à l’autorité de l’Église, l’Église travailla à perpétuer, au moins sur les affaires essentielles, l’accord par des pactes où elle traitât avec l’État de puissance à puissance, et où l’entente fût un échange de concessions : ainsi s’ouvrit l’ère des Concordats.

Nos légistes tirent de la Pragmatique sanction toute la subtilité des conséquences avantageuses à leurs maîtres : le Saint--