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témoignage écrit de ces bonnes intentions de l’Infante et de Spinola » (lettre du 6 septembre 1627), faute de quoi son crédit et celui de Rubens lui-même courraient grand risque d’être fort amoindris. A l’entendre, il était également de l’intérêt de la princesse, « en justifiant ainsi la bonne opinion qu’on avait d’elle dans le monde entier, de poursuivre avec constance une si importante affaire qui, si elle était abandonnée, ne pourrait plus être reprise ». A l’arrivée de don Diego, il avait bien fallu informer Gerbier que la cause de tous ces retards était l’annonce faite par l’envoyé du roi d’Espagne, d’un traité formel conclu entre Philippe IV et le roi de France. Aussi déçu que son confrère, Rubens, dans trois lettres qu’il lui écrivait coup sur coup le 18 septembre, tenait à le persuader que, tout en cédant aux ordres de Madrid, l’Infante ne renonçait pas pour cela à un projet qui lui était cher. « Nous croyons, disait-il, que ces ligues ne sont qu’un tonnerre sans foudre, qui fera du bruit en ayr, mais sans effet. » Au surplus, don Diego « s’était désabusé de beaucoup de choses depuis son arrivée, et il était d’avis de maintenir cette correspondance en vigueur, les affaires d’Etat étant sujettes à beaucoup d’inconvéniens et se changeant facilement. Quant à moi, ajoutait-il, je me trouve, avec un extrême regret pour ce mauvais succès, tout au rebours de mes bonnes dispositions ; « mais j’ay ce repos en ma conscience de n’avoir manqué d’y apporter toute sincérité et industrie pour en venir à bout, si Dieu n’en eût disposé autrement. »

Les regrets de Rubens étaient réels, et l’idée qu’il se faisait des intérêts de l’Espagne aussi bien que le soin de ses propres intérêts s’accordaient en cette occasion. Outre le désir de conserver les bonnes grâces de Buckingham, avec lequel il venait de conclure très avantageusement la vente de ses collections, il ne se résignait pas plus que Gerbier à voir avorter une négociation dont il s’était promis quelque honneur. Aussi quand ce dernier, voyant que sa présence était décidément inutile, était retourné près de son maître, Rubens n’avait pas cessé de poursuivre cette affaire. C’est probablement grâce à ses entretiens avec don Diego que celui-ci, reconnaissant la justesse de ses vues, avait un peu modifié ses propres idées. Rubens ne pouvait trouver un intermédiaire mieux posé pour prendre en main cette cause. L’envoyé du roi d’Espagne jouissait, en effet, de toute la confiance du premier ministre Olivarès, alors plus puissant que jamais, et les