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Pinacothèque de Munich, était depuis longtemps en relations avec lui et, à défaut de Selden, il pouvait trouver, dans son propre palais Franciscus Junius, un Allemand d’origine, qui, entré dès 1620 au service de ce grand seigneur, était devenu son bibliothécaire. Junius s’occupait dès lors de recherches sur la peinture des anciens, qui étaient bien faites pour intéresser Rubens. Quelques années après, à la suite de la publication d’une édition de son livre : De Pictura veterum, imprimée à Amsterdam, l’artiste lui témoignait tout le contentement qu’il avait trouvé à la lecture de cet ouvrage, dont il louait fort la composition, en souhaitant qu’avec la même conscience Junius donnât également un traité de la peinture italienne.

Quant aux monumens qui formaient la collection d’Arundel, rapportés d’Asie-Mineure en 1627, ils venaient d’être tout récemment installés dans le beau palais que le comte s’était fait construire au bord de la Tamise. L’ensemble ne comprenait pas moins de 37 statues et de 128 bustes exposés dans une galerie, avec des autels, des sarcophages, des bijoux, des médailles et des objets de toute sorte recueillis dans des fouilles faites à Paros. Les marbres portant des inscriptions avaient été encastrés dans les murailles du jardin attenant à cette magnifique résidence. Par un hasard singulier, tous ces monumens avaient failli devenir la propriété de Peiresc lui-même, pour le compte duquel ils avaient été achetés dans le Levant, au prix de cinquante louis, par un de ses agens, nommé Samson. Malheureusement, au moment où ils allaient être embarqués pour lui être expédiés en Provence, les vendeurs, sous un prétexte quelconque, en avaient fait différer la livraison, séduits par l’offre d’une somme un peu plus élevée que leur proposait un certain Guillaume Petty, qui les avait acquis pour le comte d’Arundel. On comprend la joie que dut éprouver Rubens à voir et à étudier tant d’objets si précieux. Bien qu’il eût prié Dupuy de communiquer à Peiresc la lettre qu’il lui adressait le 8 août, l’artiste, dès le lendemain, en écrivait une autre à Peiresc lui-même, comme s’il avait à cœur de se dédommager « du silence d’une année presque entière » qu’avait subi leur correspondance. Il se plaint à son ami des traverses apportées à son projet de passer par la Provence à son retour d’Espagne. Libre de disposer sa vie à son gré, il serait déjà allé le visiter, ou il serait à ce moment même auprès de lui… Il n’a pas cependant tout à fait renoncé à l’espoir de ce voyage en Italie, « objet de tous ses vœux »,