Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 143.djvu/895

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et plus prolifiques que nous, quoique la fécondité de certains soit en voie de diminution, il est naturel que ce nombre d’étrangers augmente. Les Allemands ayant aujourd’hui près de 100 habitans par kilomètre, avec un sous-sol meilleur, il est vrai, mais un sol sensiblement inférieur ; les Italiens comptant notablement plus de 100 habitans au kilomètre ; les Belges en ayant plus de 200 ; les Suisses et les Espagnols habitant un pays aux ressources restreintes, il est normal qu’il se produise une infiltration d’étrangers chez nous ; cette infiltration ne peut que s’accroître au fur et à mesure que la densité de la population augmentera chez nos voisins. Aucune mesure législative ou fiscale ne prévaudrait contre un phénomène aussi nécessaire. Ces immigrans, il faut nous les assimiler en les naturalisant. Nos lois sur la naturalisation, quoiqu’un peu améliorées, sont beaucoup trop rigides encore. Il n’y aurait rien d’excessif à naturaliser 50 000 étrangers par an. Nous nous procurerions par l’adoption une partie des enfans que la nature ne nous fournit pas. L’expérience prouve que la population française possède de très rares facultés assimilatrices. Quant à croire que la race française en serait défavorablement modifiée, c’est une profonde erreur. M. Novicow a parfaitement démontré qu’il n’existe pas de races caractérisées dans l’occident du continent européen ; il ne s’y rencontre que des sortes de conglomérats historiques. La France, en particulier, contient des « dolichocéphales blonds » et des « brachycéphales bruns », les premiers réputés nobles et les seconds réputés vils, des exemplaires de l’homo europæus et de l’homo alpinus. Un système suivi et méthodique de naturalisation pourra parer, dans une certaine mesure, à l’affaiblissement de notre natalité, en attendant que celle-ci se relève, ce qui ne saurait venir que de l’action énergique de causes morales modifiant notre conception de la famille.


PAUL LEROY-BEAULIEU.