n’est colère, tout est calcul. Le Pape est intrépide, il ne céderait pas aux menaces. Mais il est simple, et prêt à donner d’abord raison à ceux qui pensent mal de lui. En l’accusant de compromettre par incapacité les intérêts religieux. Napoléon soulève les scrupules les plus capables de troubler cette âme. Plus le pontife, ainsi abaissé à ses propres yeux, se fera des remords de ses maux, plus il sera disposé à subir l’ascendant de l’homme qui seul semble revêtu d’infaillibilité. En 1812, le monde, après avoir considéré comme un accident la fortune impériale, se soumet à elle comme à une loi durable, la monarchie universelle est presque achevée. Le Pape comprendra que si le Saint-Siège a justement gardé son autonomie vis-à-vis de souverains nombreux et rivaux, la même indépendance ne peut être affectée envers un protecteur unique et tout-puissant ; il reconnaîtra en Napoléon un de ces êtres privilégiés pour qui les lois communes ne sont pas faites, et desquels on ne sait, quand ils les méconnaissent, s’ils violent le droit ou le transforment. Napoléon ne poursuit pas aussitôt cette négociation où sa grande force sera sa présence. Une autre entreprise l’appelle, il faut que par une dernière campagne, il abatte un dernier adversaire. Mais avant de la commencer, il ordonne de Dresde, le 21 mars 1812 qu’on transporte Pie VII à Fontainebleau. Il veut l’avoir sous la main à son retour, dès qu’il aura vaincu la Russie.
Il revient vaincu lui-même, sans armée et n’ayant d’intact que l’orgueil. À peine rentré aux Tuileries, il écrit au Pape. La paix religieuse lui devient nécessaire : au dedans pour ne pas se heurter aux oppositions religieuses quand il lui faut obtenir de tous les Français un effort suprême ; au dehors pour ne pas fournir prétexte aux défections de la catholique et vacillante Autriche. Mais sa défaite a grandi ses exigences. Moins sûr de l’Europe, il ne veut à aucun prix que le Pape retourne à Rome ; il est prêt à l’installer magnifiquement à Avignon ou à Paris, il demande, en revanche, que le Pape prête serment de ne rien tenter contre les libertés gallicanes, nomme seulement le tiers du Sacré-Collège, et remette les deux autres tiers au choix des souverains catholiques. Comme l’Empire et ses royaumes vassaux contiennent la plus grande partie des catholiques, l’Empereur nommera la plus grande partie des cardinaux. Disposant ainsi et de ceux qui au centre meuvent la puissance pontificale par les congrégations romaines, et de ceux qui