encore un groupe d’une soixantaine de députés ; et — trente années de vie parlementaire le garantissaient — le groupe le plus compact, le plus solide, le plus gouvernemental qu’il y ait jamais eu dans la Chambre d’empire autrichienne. On ne se souvenait guère que de deux circonstances où le groupe polonais se fût divisé[1], Mais, à ces deux exceptions près, le Club polonais, dans l’opposition ou la majorité, plus souvent dans celle-ci que dans celle-là, avait toujours donné comme un seul homme, et fait balle de ses soixante voix.
Si ses prédécesseurs, sans être Polonais, avaient eu, en ce groupe, une réserve qui ne les avait pas trahis, comment le comte Badeni, Polonais de naissance, membre pour Cracovie du collège de la grande propriété galicienne, appelé du gouvernement de sa province au gouvernement de tout l’Empire, ayant dans son cabinet, comme ministre des finances, le docteur Bilinski, député de Stanislau, et comme ministre sans portefeuille, — ministre pour la Galicie, — le docteur Rittner, député de Tarnopol, voyant à la présidence du Conseil commun un quatrième Polonais, le comte Goluchowski ; comment n’aurait-il pas pensé à faire du groupe polonais sa garde et à placer en lui le pivot parlementaire de sa politique ?
Après les Polonais, les Tchèques ; Jeunes Tchèques ou Tchèques tout courts (les Vieux avaient été éliminés), et grands propriétaires fonciers de Bohême, avec, en plus, un clérical, un radical et un agrarien tchèque. Malgré les vicissitudes qui, par intervalles et pour un temps, avaient pu amener ce groupe à être un des élémens de la majorité, on était habitué à le considérer plutôt comme un parti d’opposition. Les revendications qui sont tout son programme étaient connues : il ne les dissimulait pas, ni ne les déguisait, ni ne les atténuait. Pour l’avoir, il fallait lui donner au moins un commencement de satisfaction, et de satisfaction nationale, non plus seulement personnelle. Il ne suffisait pas, comme, du camp ennemi, on l’insinuait malicieusement, de réserver aux Tchèques, pour les amadouer, une ou deux petites places dans le ministère. De ce moyen, d’autres présidens du Conseil,
- ↑ Une fois, une quinzaine de ses membres s’étaient abstenus contre l’avis de leurs collègues ; une autre fois, — c’était à propos de l’occupation de la Bosnie-Herzégovine, — quelques-uns avaient déclaré qu’ils ne pouvaient consacrer par leurs suffrages un acte qui, étant un commencement de partage de l’empire ottoman, leur rappelait trop tristement le partage de la Pologne.