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amis. Allons donc nous faire voir au bal de la duchesse de Richmond, et nous monterons à cheval à 5 heures du matin. »

A Bruxelles, on parlait de ce bal, annoncé depuis longtemps, presque autant que de la prochaine entrée en campagne. On savait que la duchesse de Richmond avait fait de grands préparatifs, qu’elle avait aménagé en hall somptueux un vaste hangar, contigu à sa maison de plaisance, que l’on danserait au son de la musique militaire, que l’on avait convié à la soirée l’élite de l’état-major anglais et de la société cosmopolite de Bruxelles, diplomates russes et allemands, pairs d’Angleterre, émigrés français. On multipliait démarches, prières, intrigues pour obtenir des invitations. En l’absence du duc de Richmond, la duchesse recevait avec sa fille aînée, plus tard lady de Ros, alors âgée de dix-sept ans. Il n’y avait guère plus de deux cents invités : le prince d’Orange, le duc de Brunswick, le prince de Nassau, lord Wellington, le bourgmestre de Bruxelles, les princes Auguste et Pierre d’Arenberg, le duc et la duchesse de Beaufort et leur fille, le duc et la duchesse d’Ursel, le comte et la comtesse de Mercy-Argenteau, le comte de la Tour-du-Pin, ministre de France à la Haye, et la comtesse de la Tour-du-Pin, le marquis et la marquise d’Assche, le comte de la Rochefoucauld, la comtesse douairière d’Oultremont et mesdemoiselles d’Oultremont, lady Fitz-Roy Somerset, le comte du Cayla (sans sa femme), sir Charles Stuart, lord et lady Seymour et miss Seymour, le comte Pozzo di Borgo et le baron Vincent, ambassadeurs de Russie et d’Autriche près Sa Majesté le roi de France à Gand, le général Alava, commissaire espagnol attaché à l’état-major de Wellington, le général de Müffling, lord Uxbridge, commandant en chef la cavalerie britannique, lord Saltoun, colonel des gardes à pied, lord Somerset, commandant la brigade des dragons de la garde, lord Hill, commandant le 2e corps anglais, les généraux Clinton, Ponsonby, Picton, Vivian, Byng, Pack, Cooke, Kempt, Maitland et un grand nombre de colonels, de majors et de jeunes capitaines, lieutenans et enseignes. Lorsque, vers minuit, Wellington entra chez la duchesse de Richmond, le bal était au moment le plus animé. Heureux de vivre, les belles jeunes filles et les beaux officiers s’enivraient de bruit et de mouvement. Mais, comme dans les danses macabres des fresques anciennes, la Mort menait la ronde. Beaucoup de ceux qui dansaient avec tant d’entrain ne devaient point voir se coucher le prochain soleil.