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outre où se porte son action, et c’est précisément sur l’organisation de cette matière verte à qui revient ce qu’il y a de plus spécial et de plus caractéristique dans les phénomènes de la vie végétale. On avait cru pendant longtemps que, si le fer était nécessaire à la formation de la chlorophylle, c’est qu’il intervenait dans sa constitution. On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien ; le métal ne fait qu’accompagner la chlorophylle dans la granulation où elle se forme.

En ce qui concerne les végétaux inférieurs, les mucédinées, l’influence que le fer exerce sur leur développement a été manifestée avec une très grande précision dans une étude qui date d’une trentaine d’années et qui est restée le modèle toujours cité des recherches sur la nutrition. M. Raulin, suivant l’exemple de son maître Pasteur, qui avait fait développer les levures dans des milieux artificiels de composition rigoureusement fixée, parvint à déterminer à propos d’une moisissure très répandue, l’aspergillus niger, la nature et le coefficient d’importance de tous les élémens qui peuvent intervenir dans sa végétation. En ce qui concerne le fer, lorsque l’on venait à supprimer ce seul élément dans le milieu capable de donner le maximum de récolte, on voyait la végétation languir et le rendement tomber immédiatement au tiers de sa valeur. Si l’on tient compte de la quantité de métal qui produit cet effet, on constate que l’addition d’une partie de fer suffit pour déterminer la production d’un poids de plante près de neuf cents fois plus grand. La suppression du fer a d’ailleurs causé ici un mal irréparable ; car, si l’on essaye, voulant imiter la pratique qui tout à l’heure avait si bien réussi chez les végétaux supérieurs, de remédier à cet alanguissement de la végétation en restituant au milieu le fer que l’on en a supprimé, la tentative reste vaine et l’on ne réussit pas à empêcher le dépérissement du végétal.

Ces faits sont pleins d’intérêt en eux-mêmes et ils montrent bien la nécessité ou l’utilité du fer dans la vie végétale, mais ils ne nous apprennent rien de plus. Ils ne nous révèlent rien du mécanisme de cette action, et si l’on veut pénétrer plus avant, c’est comme toujours à la physiologie animale qu’il faut s’adresser. Nous allons ici saisir les raisons et les circonstances intimes de l’intervention du fer dans les phénomènes de la vie.


A. DASTRE.