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Il m’avait laissé une tâche pour laquelle j’emportai une provision de matériaux, mais que je ne menai à fin qu’en 1849 et 1850, dans les loisirs assez rares qui me restaient après les devoirs de ma classe au lycée. Par quelles épreuves avaient passé les monumens d’Athènes, depuis la conquête romaine jusqu’à la fondation de la Société archéologique des Grecs modernes en 1837 ? Je tachai de retracer brièvement l’histoire des destructions, des conservations, des reconstructions à travers la domination romaine, le moyen âge, la conquête turque, la guerre de l’indépendance, et pendant les années qui s’étaient écoulées de 1837 à 1847, époque où j’étais là. Je n’ai pas à résumer cet essai qui a paru ici même le 15 août 1851. Je crois qu’avec la monographie d’Emile Burnouf, il prouve de reste qu’on n’avait pas besoin, quoi qu’on en ait dit, de nous avertir que nous n’étions pas à Athènes pour nous borner à écrire « des phrases sonores sur le paysage que le regard embrasse du haut de l’Acropole ».

Il est naturel aux philosophes de se porter vers cette partie de la théorie de l’art qu’on nomme l’esthétique. Les deux philosophes de l’Ecole d’Athènes n’y manquèrent pas. Dès l’Ecole normale, où n’existait alors aucun enseignement relatif aux Beaux-Arts, ils avaient cherché à s’en instruire au dehors et par eux-mêmes. Chaque jour de sortie, ils couraient au musée du Louvre où ils passaient de longues et fructueuses heures. Cette première éducation se continua à Rome et à Naples. Ils étaient donc initiés lorsqu’ils arrivèrent à Athènes, où les attendaient l’Acropole, ce musée incomparable, et les beautés de la Grèce elle-même.

Très promptement un fait fixa leur attention : ce fut l’intime rapport entre les monument, la religion, les œuvres poétiques, littéraires et philosophiques de la Grèce ancienne, d’une part, et la nature, le ciel, le climat, la mer, la constitution physique du pays, d’autre part. De là une question vaste qui pouvait être divisée en plusieurs autres questions. Ses études assidues sur l’art grec inspirèrent bientôt à M. E. Burnouf une thèse intitulée : Des principes de l’art d’après la méthode et les doctrines de Platon. Cet ouvrage, où se fait sentir l’influence du séjour prolongé dans l’Attique, et la thèse latine sur le Culte de Neptune, valurent à l’auteur, en 1850, le titre de docteur de la Faculté des Lettres de Paris. Deux ans plus tard, le compagnon de recherches de M. É. Burnouf soutenait, devant la même Faculté, une thèse, tout