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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 146.djvu/168

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l’opération, augmenter par-là même le nombre des éventualités contraires, et finalement les chances d’insuccès. Cependant, les commandans de l’armée, Gaucourt à leur tête, dirigèrent la colonne par la rive gauche en trompant Jeanne qui le leur reprocha dans la suite.


Orléans, situé, comme nous venons de le dire, sur la rive droite de la Loire, était le fief du duc d’Orléans, lequel n’avait pas cessé un instant détenir à la cause du Dauphin ; Orléans, dernier boulevard, gardait au nord le maigre domaine royal. De là son importance politique et stratégique : Orléans tombé, Charles VII n’aurait plus d’autre ressource que la fuite vers l’Ecosse ou l’Espagne, et peut-être la mort.

En dépit des efforts de l’énergique Yolande, la situation semblait irrémédiable ; le parti croulait de toutes parts, rien ne pouvait le raffermir. Les Anglais, bien renseignés, se préparaient à en finir avec le « roi de Bourges » et le « prétendu Dauphin ». Maîtres de Beaugency et de Meung vers l’aval, de Jargeau vers l’amont, ils mirent le siège devant Orléans le 8 octobre 1428. Sous le coup de cette menace, les Orléanais avaient consenti de grands sacrifices. Ils brûlèrent leurs faubourgs, où se trouvaient nombre d’églises et de couvens. Bien qu’ils en fussent exempts par privilège, ils reçurent garnison (un ramassis de Gascons, d’Italiens, d’Aragonais et d’Ecossais) ; ils fondirent des canons, fabriquèrent de la poudre, etc.

Les Anglais, voulant prendre la ville par la famine, commencèrent à jeter autour de l’enceinte une ligne discontinue de retranchemens ; bornant leurs attaques au fort des Tourelles qui défendaient l’entrée du pont, ils s’emparèrent de ce fort et détruisirent les deux arches les plus voisines de la rive gauche. Pendant l’hiver de 1428 à 1429, ils travaillèrent à se fortifier sur tous les points.

Onze ouvrages, — bastilles ou boulevards, — enveloppaient la ville. Le front ouest était le principal comme faisant face à l’adversaire ; les redoutes qui l’armaient communiquaient entre elles par des tranchées. Le front est formait comme les derrières de la disposition et n’était garni d’aucun retranchement ; deux bastilles observaient la Loire vers l’amont ; un boulevard veillait la partie inférieure du cours. Le périmètre de la ligne atteignait six kilomètres ; la distance aux murailles, cinq cents mètres ;