perdu son instrument à la bataille de Marengo, eut l’honneur d’en recevoir un autre des mains du ministre de l’Intérieur.
Le succès des Exercices-Concerts augmenta rapidement. Les symphonies de Haydn et celles de Mozart formèrent peu à peu le fond du répertoire. Haydn écrivait en 1806 à Cherubini : « Je vous prie de recevoir mes remerciemens et de les faire agréer aux membres du Conservatoire, au nom desquels vous avez eu la bonté de m’écrire. Ajoutez bien que tant qu’Haydn vivra, il portera dans son cœur le souvenir de l’intérêt et de la considération qu’ils lui ont témoignés. » Le Conservatoire devint, selon Fétis, « le rendez-vous des artistes, des amateurs et des étrangers de distinction. La symphonie y fut exécutée avec un feu, une verve de jeunesse qu’on ne retrouvera peut-être plus ». Il était de règle de donner tous les ans pour jeune chef à ce jeune orchestre le lauréat du premier prix de violon. Quand vint le tour d’Habeneck, il fit preuve aussitôt d’une telle maîtrise, qu’on dut lui laisser son commandement. Il l’exerça neuf années de suite, de 1806 à 1815, et c’est pendant cette période qu’il fit exécuter pour la première fois par ses camarades la première symphonie de Beethoven.
La renommée des concerts du Conservatoire durait encore en 1821. On lit dans le Journal des Théâtres du 20 juin : « Ces exercices sont très suivis et méritent de l’être. Il est en effet fort intéressant d’entendre de jeunes élèves exécuter la musique comme des professeurs, et de voir un chef d’orchestre, pour ainsi dire encore imberbe, conduire avec un talent que n’ont pas beaucoup de musiciens consommés. » Mais, peu après, la décadence commença. Supprimé, puis rétabli par le gouvernement de la Restauration, le Conservatoire courut de nouveaux périls. Il s’attira des reproches, des menaces même, qui trouvaient une excuse, un prétexte au moins, dans son état d’abaissement.
Habeneck s’alarma de cette déchéance. Professeur d’une classe de violon, chef d’orchestre de l’Opéra, admirateur enthousiaste de Beethoven, la pensée lui vint de sauver l’école de musique qu’il estimait la première du monde, par le génie du maître que dès lors il regardait aussi comme le premier. Mais d’abord il fallait révéler, confesser le dieu nouveau. Pour assurer son triomphe, rien ne rebuta son sénateur. L’apostolat fut rude. Naguère, au concert des élèves, la première symphonie de Beethoven, préparée par les symphonies de Mozart, avait paru leur ressembler ; elle passa. La seconde rencontra plus de résistance. C’est en 1821 qu’Habeneck l’inscrivit d’office au programme d’un concert spirituel à l’Opéra. Les répétitions furent orageuses. D’un bout à l’autre de l’orchestre, les musiciens échangeaient leurs obser-