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flotte marchande à vapeur allemande dépasse un million de tonnes, plus du double de la nôtre.

Le rapprochement des statistiques du commerce allemand avec celles du nôtre force les plus indifférens à méditer sur le problème. M. Schwob, dans un travail d’une précision vigoureuse, a dressé, au moyen de documens officiels et de rapports consulaires, le bilan des progrès de nos rivaux. En 1895, les exportations de l’Allemagne en Russie atteignaient 472 millions de francs ; la même année, ses exportations de sucres en Norvège dépassaient celles de toutes les autres nations réunies ; en Hollande, la Prusse seule exportait en 1894 pour 560 millions de francs, alors que notre part n’atteignait pas 45 millions ; en Danemark, nous vendons pour 7 millions, l’Allemagne pour 154 millions ; en Suisse, notre exportation abaissé des deux tiers, pendant que celle de l’Allemagne en gagnait à peu près autant. De 1891 à 1893, nos ventes en Belgique ont baissé de 326 à 278 millions, tandis que celles de l’Allemagne ont passé de 164 à 180 millions. La Roumanie nous achète pour 36 millions, et pour 117 à l’Allemagne, qui, en dix ans, a gagné 160 pour 100 et seule a fourni toute l’augmentation des importations en Roumanie. A la Bulgarie, elle vend, en 1894, pour 12 millions de marchandises, tandis que nous n’arrivons pas à 4 millions.

En Espagne, tous les rapports consulaires signalent l’envahissement des marchés par les Allemands et le déclin de nos propres exportations. En Italie, l’Allemagne exporte pour 140 millions, et nous pour un chiffre qui n’est supérieur que de quelques millions, alors qu’en 1887 il atteignait encore 326 millions ; le port de Palerme, en 1894, n’a pas vu un seul navire français, tandis qu’il a reçu 119 vapeurs allemands jaugeant 127 000 tonnes. En Grèce, nos importations sont tombées à 6 millions ; celles de l’Allemagne se sont élevées à 8 : elles étaient nulles il y a quinze ans. En Turquie d’Europe et d’Asie, la marche des choses est la même. En Égypte, les statistiques du port d’Alexandrie indiquent une augmentation énorme des importations allemandes, sans compter les quantités d’objets de contrefaçon fabriqués à Hambourg et introduits, là comme ailleurs, sous des étiquettes étrangères ; à Tripoli, le chiffre d’affaires des Allemands a triplé depuis 1890. Au Maroc, où ils nous serrent de près, ils en font pour 5 millions. Dans l’Afrique australe, l’Allemagne envoie pour 14 millions de marchandises au Cap, 10 millions au Transvaal. Aux Indes, les 200 millions