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des mérites qu’elle ignorait et dont on s’emparait ailleurs. Maintenant que les étrangers ont pris une avance qu’il est impossible de méconnaître, il semble qu’elle commence à se douter du temps et du terrain perdus. Elle est certes, si elle le veut, en état de les regagner promptement.

Nous allons exposer en quoi consiste l’océanographie, montrer les rapports étroits qu’elle présente avec les autres sciences, son utilité théorique et pratique ; nous raconterons l’histoire abrégée de ses progrès depuis ses débuts jusqu’au moment où elle est devenue un ensemble bien complet, exposé clairement coordonné de faits examinés avec soin, de phénomènes mesurés et expliqués. Nous dirons quelques mots sur ce qui, dans cet ordre d’idées, a été exécuté par les diverses nations avec le caractère que leur tempérament particulier, les conditions de leur passé et de leur présent, ont imprimé à leurs travaux. De même, en effet, que chaque homme marque chacune de ses actions, au physique comme au moral, d’un cachet spécial qui est l’empreinte de sa personnalité ainsi dans le domaine de la science, chaque race imprime à son œuvre, fruit de son esprit collectif, une empreinte qui lui est propre et constitue l’essence même de son génie.


I


L’océanographie est l’étude de la mer. L’océanographie statique s’occupe de l’eau salée considérée indépendamment des mouvemens qui s’y manifestent ; elle traite successivement de la topographie du lit des océans et de la constitution même de ceux-ci, de leur lithologie ; elle analyse les eaux, examine leur composition et leur influence sur la nature des fonds, leurs multiples propriétés physiques, la façon dont elles subissent les effets des variations de la température, leur densité, leur compressibilité, le mode de propagation de la lumière à travers leurs couches superposées et les divers phénomènes optiques. Les glaces polaires forment un chapitre de l’action du froid sur la mer.

En océanographie dynamique, on étudie l’océan en mouvement, les vagues qui, sous le souffle des vents en agitent la surface, les courans qui, semblables au réseau des artères et des veines, en sillonnent la masse jusqu’à une certaine profondeur et résultent de l’action simultanée de la chaleur, de l’évaporation, de la topographie du fond, de la configuration géographique des continens