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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 147.djvu/193

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diplomates doivent discuter en paix, semblerait inquiétant à tout esprit impartial. On reste surpris du silence de toutes ces Associations pour la paix qui s’émeuvent si vite en Europe, quand nous pouvons « menacer la paix du monde » et gardent bouche close quand d’autres que nous envahissent sans crier gare les riches goldfields de leurs tranquilles voisins.

Rappelons en terminant les positions des deux parties : selon les Anglais, la ligne Saye-Barroua vaut non seulement pour nos possessions méditerranéennes, mais aussi pour l’intérieur du Dahomey, annexé pourtant depuis 1890 ; le méridien de Say doit limiter notre extension à l’est ; Boussa, Nikki, nous les occupons indûment. Ils se taisent sur la navigation du bas Niger, le respect de l’acte de Berlin, la question de l’occupation effective (qui leur a servi cependant à spolier le Portugal des rives du Zambèze), et ne disent mot du Mouri, de Yola. À l’ouest de la Côte d’Or, ils ont évacué Bondoukou, mais occupé Bouna, français dès 1894, Gambakha, allemand depuis 1897, et prétendent même au Gourounsi et au Mossi.

La France réclame tous ces points, que nous avons admis sous notre suzeraineté et occupé effectivement. Au nord du Dahomey, nous affirmons que la ligne Say-Barroua ne concerne en rien la rive droite du fleuve, qui restait res nullius, et que nous avons occupée et administrons en respectant la convention de 1890 et la situation des Anglais sur le fleuve. Nous croyons sans valeur les traités du capitaine Lugard et ceux de Fergusson. Nous réclamons l’application de l’acte international de Berlin ; nous rappelons à l’Angleterre que la convention Ribot parle du Sokoto et nullement du Bornou ; que le Sokoto n’est pas du tout soumis à la compagnie du Niger, pas plus que le Noupé et le Gando qui repoussent sans cesse les envoyés de l’Angleterre et expulsent les émirs qu’elle veut imposer ; enfin que le Mouri et Yola ont reçu le drapeau français.

L’Allemagne pouvait s’intéresser aux négociations. Elle s’en est exclue en renonçant à Yola, au Gourma. Un conflit pouvait naître avec l’Angleterre pour la zone neutre de Salaga, que celle-ci occupait sans titres. M. Chamberlain en a ordonné l’évacuation ; aucun Anglais n’a protesté. Ici, comme en Chine, nous voyons l’Angleterre se rapprocher de l’Allemagne, lui faire des concessions, approuver ses actes, même les plus nuisibles à l’Angleterre. Nous voilà loin du temps où les caricatures anglaises