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sinon probables, car nul ne saurait se piquer d’être prophète en pareille matière ; enfin, des faits de guerre déjà connus nous chercherons à tirer quelques enseignemens utiles.


I. — MARINE DES ÉTATS-UNIS

Une fort belle façade, mais point de corps de logis, ou d’insuffisans et inachevés, en tout cas des fondemens peu solides, tel est l’aspect sous lequel se présentait, en novembre 1897, lorsque fut publié le « Rapport annuel du secrétaire d’Etat à la Marine », l’établissement naval des Etats-Unis. Et c’est vraiment d’une belle hardiesse, cette proclamation sans réticences, cet aveu sans détours de l’étonnante imprévoyance qui avait marqué jusque-là les actes du département. A la vérité, quelques esprits mal faits s’avisèrent d’observer que M. Davis Long ne constatait ainsi que les fautes ou les négligences de son prédécesseur, du secrétaire d’État de l’administration de M. Cleveland, et que, sans nul doute, il eût jeté quelques voiles sur la fâcheuse situation de la marine américaine si l’Annual Report de 1897 avait été le quatrième et non pas le premier document de ce genre adressé par lui au Président de l’Union.

Mais peu nous importe, à nous, spectateurs. Et, sans examiner de près les motifs du secrétaire d’Etat actuel, nous nous bornerons à constater avec lui :

Qu’il n’y avait, il y a six mois, de munitions de guerre que le contenu des soutes des bâtimens armés, de sorte qu’il eût été impossible de les réapprovisionner après un combat de quelque durée ;

Qu’il n’existait dans le golfe du Mexique, c’est-à-dire sur le théâtre d’opérations qui devait attirer d’une manière toute spéciale l’attention du département, aucun port de guerre, aucun arsenal pourvu de magasins, d’ateliers, de bassins de radoub, aucune base d’opérations navales, en un mot, mais à peine une coaling station assez mal défendue, un dépôt de charbon, Key-West.

Que d’ailleurs, dans tous les ports militaires des États-Unis, on ne pouvait compter que quatre bassins de radoub capables de recevoir les navires de premier rang ; que, de ces quatre bassins, l’un avait un besoin urgent de réparations, l’autre, très long, mais d’une insuffisante largeur, ne pouvait admettre les cuirassés les plus récens de la flotte américaine, aux œuvres vives très