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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 147.djvu/357

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il n’y en a que 58 et 48 pour 100 de vrais Yankees, de native born, les autres étant des naturalisés de fraîche date ; ensuite parce que, dans les marins native born, il y a un bon nombre de nègres, et que c’est une délicate question de savoir si la fermeté sous le feu, l’esprit de discipline, l’instinct nationaliste des contingens de couleur, en un mot si leur force morale vaut celle des contingens de race blanche.

De qualité très discutable, pour ne rien dire de plus, le personnel combattant américain est-il du moins en nombre suffisant ? Point du tout. Au mois de novembre dernier les bâtimens armés, — à peu près les deux tiers, à la vérité, de la force navale disponible, — absorbaient la totalité de l’effectif ! Et il ne fallait pas compter sur les réserves on personnel, car de réserves il n’y en avait pas, personne ne prenant au sérieux la Naval militia, 3 000 pauvres diables recrutés, exercés quelquefois, — rarement, — par les divers États littoraux, au demeurant destinés au service de la défense des côtes plutôt qu’à celui de la flotte active.

La valeur d’ensemble du corps d’officiers rachetait-elle, par contre et en quelque mesure, de si graves défauts ?… Ici M. Davis Long se montre plein de confiance, et nous ne dirons pas, pour affaiblir la portée de cette constatation, qu’il ne pouvait évidemment tenir un autre langage, d’une part parce qu’il n’en est pas à faire ses preuves de franchise et qu’il ne laisse pas de marquer au passage, d’une touche discrète et ferme à la fois, quelques assez graves imperfections ; de l’autre parce qu’en effet nul ne songe à contester la haute valeur professionnelle et morale, la science militaire et nautique, l’énergie, le patriotisme d’un corps où se conservent soigneusement les grandes traditions des Décatur, des Farragut, des Porter, des Maury.

Mais, là encore, le nombre est insuffisant ! Et il n’y a point de cadres de réserve organisé !

Tel est, dans cette rudimentaire et vicieuse organisation du personnel, le principal défaut de la cuirasse dont nous allons montrer maintenant les reliefs brillans et polis.

On a volontiers écrit et répété dans nos journaux, au début des complications actuelles, que les États-Unis n’avaient pas de flotte sérieuse. C’était retarder de dix ou quinze ans, et il faut reconnaître au contraire que l’administration de M. Cleveland, ainsi que celle de M. Hayes, avaient fait, pour augmenter