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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 147.djvu/545

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la guerre franco-allemande, aux navires français stationnant dans la Baltique, mais sans en prohiber l’exportation dans nos ports. Quant à la France, elle s’est formellement abstenue, depuis 1859, de ranger le charbon parmi les articles de contrebande et nous ne saurions la désapprouver[1].

Elle n’a donc pas, dans sa déclaration de neutralité, limité la quantité de houille qui pourrait être fournie aux belligérans. Au contraire, d’après une dépêche de l’île Saint-Thomas, datée du 16 mai, les navires des belligérans ne seront désormais admis à faire du charbon que sur l’autorisation du gouvernement danois et chaque navire n’embarquera qu’une quantité de combustible fixée par les autorités. Enfin les instructions anglaises sont ainsi conçues : « Les navires de guerre des belligérans ne seront autorisés à prendre, tant qu’ils séjourneront dans les ports, rades et eaux territoriales de la juridiction du gouvernement de Sa Majesté, aucunes provisions, sinon celles qui seraient nécessaires à la subsistance de l’équipage, ni du charbon, si ce n’est la quantité strictement nécessaire pour les mener jusqu’au port le plus voisin de leur propre pays ou jusqu’à quelque destination plus rapprochée. En outre, on ne donnera pas de nouveau, dans les trois mois qui suivront, du charbon au même navire de guerre dans le même port ou dans tout autre ou dans des eaux quelconques soumises à la juridiction territoriale de Sa Majesté, sans une permission particulière. »

Ce n’est pas là précisément, qu’on le remarque, refuser du charbon aux belligérans. Du reste, à la Chambre des communes, le 22 avril 1898, sir E. Gourley ayant demandé si quelque convention postérieure à la déclaration de 1856 permettait de ranger parmi les articles de contrebande le charbon et le combustible liquide (pétrole, etc.), sir R. Webster, attorney général, répondit qu’à sa connaissance il n’existait aucune convention semblable, et que « si le charbon ou le combustible liquide étaient contrebande de guerre, il deviendrait illicite d’en fournir aux belligérans. » Cette réponse implique que le charbon ne serait pas de bonne prise à bord d’un navire neutre, puisque le pavillon neutre couvre la marchandise à l’exception de la contrebande, et par conséquent le navire anglais Twickenham aurait pu, comme l’annoncent les

  1. Nous avions approuvé, il y a vingt ans, la réponse faite en 1872 par M. Sclopis au tribunal arbitral de Genève. Nous nous sommes rattaché, dans la session de l’Institut de droit international tenue à Venise en 1896, à la théorie française.