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LOUIS XVIII ET LE DUC DECAZES
D’APRÈS DES DOCUMENS INÉDITS

I
LES DERNIERS JOURS DU CABINET RICHELIEU-DECAZES (1818)

Les événemens de la Restauration ont eu de nombreux historiens, après lesquels il n’y a pas lieu d’en recommencer le récit. Mais, sur le domaine où ces écrivains firent leur moisson, il reste encore beaucoup à glaner. Il n’est pas trop tard pour reconstituer, en marge de cette grande histoire, des épisodes incomplètement connus et pour y répandre un peu plus de lumière. C’est cette tâche que j’entreprends aujourd’hui à l’aide de documens très précieux, mis à ma disposition par leur possesseur. Ces documens proviennent des archives du château de la Grave, où le premier duc Decazes, précipité du pouvoir en 1820, commença à les rassembler après sa chute. Il rêvait alors d’écrire ses Mémoires. Si le projet qu’il avait conçu ne fut pas réalisé, si l’ancien favori de Louis XVIII ne rédigea que deux ou trois chapitres de l’histoire de sa vie, du moins légua-t-il à son fils tous les élémens de cette histoire.

Le second duc Decazes, — celui que nous avons connu ministre de la République, de 1873 à 1877, — s’était promis d’élever à la mémoire de son père le monument auquel elle a droit. Les occupations et les soucis d’une existence dont une grande part fut consacrée aux affaires publiques lui firent ajourner l’exécution de ce dessein, et il mourut sans l’avoir accompli. Il m’honorait d’une amitié qui n’était égalée que par mon dévouement pour lui. Souvent, en me montrant les belles archives de la Grave et en laissant ma curiosité d’historien s’y donner librement cours, il