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L’ÉVOLUTION POLITIQUE
DE L’ÉCOLE PRIMAIRE

La dernière lutte électorale a mis en présence deux conceptions de la République. Pour la première fois depuis le Quatre Septembre, ce n’est point entre la République elle-même et les partis d’opposition que le duel s’est engagé ; c’est entre deux grandes fractions du parti républicain, entre la politique radicale et la politique modérée, entre les candidats de l’extrême gauche et les défenseurs du cabinet Méline. Sur ce terrain nouveau, les maîtres de notre enseignement frimaire, vieilles troupes auxiliaires qui, depuis quinze ans, combattaient pour la République, ont continué de prendre un ordre de bataille et de pratiquer l’offensive ; et, le plus souvent, c’est derrière les radicaux qu’ils se sont rangés, et contre les républicains de gouvernement qu’ils se sont acharnés. On ne l’ignore point au ministère de l’Instruction publique, non plus qu’au ministère de l’Intérieur : les réclamations ont afflué, les plaintes ont fait assaut ; et tel candidat gouvernemental, dénonçant la propagande hostile des instituteurs, recevait cette réponse plus confiante qu’encourageante : « Qu’y voulez-vous faire ? C’est ainsi partout. » Lors même que les convenances de la politique commanderaient au grand maître de l’Université de couvrir d’un voile l’attitude de ses fonctionnaires, un certain nombre de républicains modérés, qui ont succombé sous la double poussée du socialisme et de l’école primaire, seraient en mesure d’arracher ce voile. La force électorale qu’avait créée le parti républicain s’est retournée contre une moitié de ce parti :