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LOUIS XVIII ET LE DUC DECAZES
D’APRÈS DES DOCUMENS INÉDITS

III.[1]
L’ASSASSINAT DU DUC DE BERRY (1820)


I

L’ordonnance qui mettait dans les mains de Decazes la direction suprême du gouvernement était à peine signée qu’on l’accusait de l’avoir arrachée à la faiblesse du Roi. L’accusation n’avait pas plus de fondement que n’en avait eu, l’année précédente, celle de s’être livré à des manœuvres souterraines pour contraindre Richelieu à donner sa démission. Plus tard, beaucoup plus tard, ces deux griefs devaient se dissiper à la lumière de la vérité. L’histoire en a fait justice. En réalité, Decazes n’avait fait qu’obéir à la volonté du Roi comme aux objurgations du comte de Serre. S’il commit alors la faute de n’y pas résister et de ne pas se montrer plus habile à se ménager l’avenir, en se retirant, du moins ne faisait-il de tort qu’à lui-même. Il ne pouvait d’ailleurs oublier qu’à maintes reprises, il avait trouvé des appuis à gauche sans associer la Gauche au pouvoir. N’était-il pas fondé à espérer qu’il aurait le même bonheur avec la Droite et qu’elle le soutiendrait sans exiger des portefeuilles ? Il se jetait donc dans la bataille avec son ordinaire énergie. Il est bien difficile de le blâmer d’avoir eu d’abord confiance dans le succès. Mais, en peu de jours, cette confiance reçut de rudes assauts. Vainement, d’accord avec

  1. Voyez la Revue du 15 juin et du 1er juillet.