on abandonne le verger et le bois de Hougoumont. Les hussards de Vivian et les dragons de Vandeleur, qui font trouée devant les masses anglaises, sabrent les fuyards aux cris féroces : No quarter ! No quarter !
Tandis que la moyenne garde abordait les positions anglaises, les 2e bataillons du 1er chasseurs, du 2e grenadiers et du 2e chasseurs (vieille garde), avec les généraux Cambronne, Roguet et Christiani étaient arrivés près de l’Empereur, au pied de la Haie-Sainte. Napoléon s’occupait à les former en colonne d’attaque, un bataillon déployé et deux sur les flancs en colonne serrée, pour les mener lui-même sur le plateau où « tout allait bien, » au dire de Friant, qui en revenait blessé ; tout à coup, il vit l’écroulement soudain de sa ligne de bataille. Lui aussi sentit alors qu’il était irrémissiblement vaincu. Mais il conserva l’espoir d’organiser la retraite. Sans rien perdre de son sang-froid, il fit rompre la colonne de la vieille garde et établit les trois bataillons, en autant de carrés, à cent mètres environ au-dessous de la Haie-Sainte, le carré de droite sur la route de Bruxelles. Il comptait qu’à l’abri de cette digue l’armée pourrait se rallier et s’écouler.
Les hussards de Vivian, impuissans à mordre sur ces carrés, les tournent et continuent leurs rouges sillons dans la cohue des fuyards. Ivres de sang, ils s’acharnent au carnage. Un sous-officier du 18e dit à Vivian : « — Nous vous suivrons jusqu’en enfer, si vous voulez nous y conduire. » L’Empereur lance ses quatre escadrons de service contre un nouveau flot de cavalerie qui les submerge.
Non loin de la route, Ney, à pied, tête nue, méconnaissable, la face noire de poudre, l’uniforme en lambeaux, une épaulette coupée d’un coup de sabre, un tronçon d’épée dans la main, crie avec rage au comte d’Erlon qu’entraîne un remous de la déroute : « — D’Erlon ! si nous en réchappons, toi et moi nous serons pendus ! » Le maréchal « ressemble moins à un homme qu’à une bête furieuse. » Ses efforts durant tout ce jour ont excédé l’énergie et les forces humaines. Jamais en aucune bataille, aucun chef, aucun soldat ne s’est tant prodigué. Ney a surpassé Ney ! il a conduit