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1795 à 1797, le voyageur, parvenu à Ségou, eut l’émotion de voir se dérouler à ses pieds le courant ardemment cherché, « la nappe imposante du Niger, brillant aux rayons du matin, aussi large que la Tamise au pont de Londres et coulant vers l’orient dans une majestueuse lenteur. » Son récit excita en Angleterre le plus vif enthousiasme. On voulut élucider le problème du Niger et de toutes parts les bonnes volontés se manifestèrent ; des fonds furent recueillis ; une expédition nombreuse lui organisée. Ce fut à la tête d’une troupe de quarante Européens, qu’en 1805, Mungo-Park remonta la Gambie, atteignit Bammakou et Ségou et revit le cours du fleuve, non sans avoir eu à supporter des fatigues et des difficultés inouïes. Tous ses compagnons de voyage étaient morts et ses ressources étaient épuisées. Mais Mungo-Park était de la race de ces hommes que laissent impassibles les pires coups du destin. Il construisit de ses propres mains un radeau, et, téméraire comme l’homme au cœur bardé d’airain dont parle le poète, il osa confier son frêle esquif aux flots inconnus. On ne le revit plus.

La voie était frayée cependant et, dès que la fin des grandes guerres napoléoniennes eut permis à l’Angleterre de reporter son attention sur l’Afrique occidentale, expéditions sur expéditions furent envoyées dans la direction du Niger. En 1816 et 1817, Gray et Dochard cherchèrent à nouveau à atteindre le fleuve. La même année, Tuckey remontait le Congo, qu’on disait alors être l’embouchure du Niger, Peddie refaisait la route de Mungo-Park, tous deux croyant aller au-devant l’un de l’autre en suivant la même voie fluviale. En 1822, le major Laing se dirigeait de la Gambie vers le haut Sénégal et arrivait à Tombouctou. De 1822 à 1824, Clapperton, Oudney et Denham traversaient le Sahara et pénétraient en plein Soudan central. De retour en Europe, Clapperton en repartait presque aussitôt pour l’Afrique et atteignait, sur le Niger moyen, les rapides de Boussa. Ce fut ce dernier qui révéla à l’Europe le sort infortuné de Mungo-Park. Pendant quatre mois, le héros s’était laissé porter par les eaux du fleuve, au gré du courant, traversant ainsi aux yeux des populations étonnées le pays des Touaregs, celui des Haoussas, et la grande courbe du Niger ; son radeau avait enfin chaviré dans les rapides de Boussa et ce naufrage avait mis fin à son odyssée aventureuse. Clapperton mourut lui-même au Sokolo, et ce fut à son domestique Richard Lander qu’échut, en 1830, l’honneur de découvrir