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par la fenêtre, puis, se rasseyant : « Je vous demande pardon, dit-il à Mrs Fountain, mais c’était une vilaine mouche. Je ne puis les souffrir. Elles me font toujours penser à Beelzébub, qui était le prince des mouches. » Avons-nous besoin d’ajouter que ce prêtre non seulement tue encore de nombreuses mouches dans la suite du roman, mais est en outre un niais, et un hypocrite ? Il parle avec mépris des savans, qui refusent d’admettre les miracles de Lourdes. « Deux médecins sont là, dit-il, qui contrôlent les guérisons ! » Et tout en montrant à Laura une « politesse obséquieuse » il l’espionne, la fait surveiller par ses paroissiens, travaille à hâter son départ.

C’est du reste un brave homme, « supérieur même à la plupart de ses confrères anglais. » Et Laura le préfère de beaucoup aux sœurs de l’orphelinat, dont elle fait la connaissance quelques jours après. « Fi ! quelles manières ! » s’écrie-t-elle après qu’Alan les lui a présentées. « Est-il donc indispensable que tout catholique ait cette mine écœurante et cafarde ? » Et elle songe « avec un frémissement de colère » que « trois de ces femmes noires ont osé l’embrasser ! » Celles-là aussi sont des modèles de sottise et d’hypocrisie. Quand elles apprennent qu’Alan Helbeck veut épouser Laura, il n’y a pas de ruses qu’elles n’emploient pour l’en empêcher. Insinuations perfides, délations, mensonges, rien ne leur coûte. Une d’elles dit, d’une voix pleurarde, à Mrs Fountain qu’elle « ne peut se défendre de penser à saint Philippe de Néri, qui a été attaqué par trois diables près du Colisée, parce que l’enfer était jaloux du succès de son œuvre sainte parmi les jeunes gens de Rome. »

Un hasard permet à Laura de se rendre compte, une fois pour toutes, de l’éducation qu’elles donnent aux enfans de l’orphelinat. Et, bien que la scène soit un peu longue, elle mérite, croyons-nous, d’être citée en entier. Un jour donc, la jeune fille, rentrant d’une promenade, trouve la cour de Bannisdale toute remplie d’enfans : ce sont les orphelines qui sont venues pour une fête ; maintenant elles jouent sous les yeux des sœurs, et Helbeck se fait un devoir de jouer avec elles. Laura a trop bon cœur pour ne pas se hâter de lui venir en aide, dans cette corvée.

« Et la voici courant, sautant, tournant avec les plus gaies des petites filles, tandis que ses cheveux d’or, dénoués, étincelaient au soleil. C’était à présent Helbeck qui la contemplait. Quel singulier mélange de grâce et de résolution dans tous ses