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contemplation, de narration, et trop peu de lyrisme. On souhaiterait de plus nombreuses pages comme le chœur du peuple réclamant des gardes pour le tombeau de Jésus, comme le duo, de vieil et grand style italien, que chantent, près du sépulcre, les deux Maries. Le reste a moins d’éclat, mais peut-être autant de beauté. Jamais on n’eut attendu cette gravité, ce sérieux dans la jeunesse, d’un Italien de cet âge et de notre temps. Ce sont deux oraisons touchantes que le chœur des femmes : Cruz fidelis ! et le chœur final : Recessit pastor noster. L’un et l’autre s’engagent discrètement et comme de biais ; écrits avec pureté, l’un et l’autre sont délicieux de tendresse et de mélancolique piété. Mais, déjà dans cette seconde partie, j’admire par-dessus toute chose la tenue et la noblesse constante du récit. Il occupe une place considérable dans les « Histoires sacrées » de l’abbé Perosi, ce récit de l’« historien, » qui n’est plus l’ancien récitatif, monotone et coupé d’accords, mais un chant mélodique et continu, tantôt solitaire et tantôt accompagné. Le musicien a constamment obtenu de cette narration expressive les effets les plus heureux. Par la simplicité, mais par l’énergie ou la suavité des intonations et des accens, par la fermeté des cadences, ou au contraire par leur incertitude, il donne à des paroles en apparence indifférentes un sens profond et comme une résonance lointaine. Quand se rencontrent, dans le texte évangélique, certains mots consacrés, de ces mots redoutables et qui sur toute musique pèsent d’un poids si lourd, il arrive souvent à cette musique de n’en être point écrasée. Au début d’un oratorio précédent, la Transfiguration, lorsque « Jésus emmène avec lui Pierre, Jacques et Jean, » au seul nom de Jean : El Johannem, une modulation légère éveillait un sentiment délicieux de mystère et de retraite au loin. A chaque instant, dans la Résurrection du Christ, les plus graves paroles ont été rendues dignement. La mort, et surtout l’ensevelissement et la sépulture de Jésus, tous ces augustes épisodes ont été racontés avec autant d’émotion pénétrante que de simple grandeur.

Entre la première partie, consacrée à la mort, et la seconde, qui chante la résurrection et la vie, le contraste est saisissant. Il l’est tout de suite. Nous sommes au « matin du triomphe, » et le prélude qui l’annonce est matinal et triomphant. Tout à l’heure contenue et concentrée, la musique maintenant éclate et se déploie au dehors. Sur un continuel frémissement des cordes, un clair appel de trompette d’abord, puis de trombone, s’élève lentement. Entonné par toutes les voix unies, un Alléluia grégorien lui répond. Égaux par la simplicité et par la puissance, les deux thèmes emplissent l’espace et semblent