patronage, si, pour l’œuvre de Palestine et pour l’œuvre de Syrie, ils n’étaient sûrs d’une approbation auguste. Une autocratie absolue comme celle des tsars n’est impuissante qu’à dérober sa volonté derrière l’indépendance de ses sujets : comme elle supprime tout ce qu’elle désapprouve, elle veut tout ce qu’elle permet. Et cette action de la Russie dans la plus catholique des provinces turques, inquiète tous les chrétiens unis à l’Église romaine. La conduite du gouvernement russe envers les Polonais et les Ruthènes prouve combien, dans cet Empire, la liberté de conscience est mesurée aux dissidens. Les catholiques de Syrie et de Palestine prévoient le même sort, craignent tout ensemble pour leur nationalité et pour leur foi. Et comme l’une et l’autre ont pour protectrice la France, la France serait menacée elle-même par le projet formé contre eux.
L’amitié de la France et de la Russie offrait opportunément, ce semble, un moyen de dissiper ces obscurités. Elle les a maintenues et épaissies. C’est depuis le moment où l’alliance a été nouée que l’effort de l’orthodoxie contre le catholicisme est devenu plus actif, et que la propagande russe s’exerce avec une énergie croissante dans les contrées les plus acquises à l’influence française. C’est depuis ce moment que la France a opposé le moins de résistance aux manœuvres du clergé grec, tolère le plus d’usurpations dans les Lieux saints, laisse en Palestine et en Syrie la carrière libre à l’activité russe. Rien n’égale la désinvolture avec laquelle notre alliée a pris ses aises, sinon la discrétion avec laquelle nous les avons respectées. Son intimité avec nous a aussitôt atteint ce degré où l’on regarde comme à soi ce qui appartient à un ami : notre affection s’est élevée à cette plénitude parfaite où l’on se considère comme n’ayant plus de droits sur ce que l’ami désire. La passivité de notre diplomatie, notre indifférence à défendre nos intérêts, notre libéralité à les abandonner, l’attitude assurée de la Russie quand elle étend la main sur nos droits, et notre trouble quand il nous faut les défendre, tout est surprise, anxiété pour notre clientèle catholique. Elle se demande si l’influence irréligieuse qui domine en France les pouvoirs publics l’emporte sur les constantes traditions de notre politique ; si nos nouveaux hommes d’Etat ont mis leur philosophie à oublier qu’en Orient, la Russie et la France protègent des Eglises rivales ; si, après avoir conclu un traité, sans convenir de ce que la propagande des deux nations pourrait se permettre