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qui a joué pendant cinquante ans le ridicule par lequel il périt! Turpe senilis amor.

Nous sommes menacés de perdre aussi Mlle Contat.

On dit qu’elle est mariée depuis longtemps à un M. de Parny, neveu du poète, et qu’elle va déclarer son mariage et sa retraite. D’autres assurent qu’elle ne fera ni l’un ni l’autre, parce qu’elle est trop endettée pour se priver des ressources que lui procure son talent. Cela nous laisse quelque espoir, car ses dettes sont connues, et les 18 000 livres de la représentation donnée à son profit ne suffiraient pas, à beaucoup près, à les payer.


Paris, le 6 juillet 1802.

Nous avons dit plus haut qu’après avoir longtemps marché comme à l’aventure, sans aucun plan arrêté, Bonaparte avait enfin pris son parti et s’était décidé à fonder une nouvelle dynastie. Mais nous laissâmes entrevoir que cette détermination était moins l’ouvrage de sa volonté que le résultat des insinuations de Lucien et de la force des circonstances qui ne lui laissent guère à choisir qu’entre ce parti et le rétablissement de la maison de Bourbon. Une fois lancé dans la carrière, il a dû s’étonner de trouver des obstacles ; il a dû s’en indigner; et lorsqu’il a reconnu que la précipitation de ses flatteurs et la malice de ses ennemis avaient produit, en dernier résultat, une fausse démarche, une demi-mesure qui n’a que des inconvéniens sans un seul avantage, on peut juger quel aura été son mécontentement.

On a vu par les papiers publics comment Bonaparte répondit au message lui transmettant le sénatus-consulte. Son humeur perce dans sa réponse. On y entrevoit qu’il avait pris la résolution d’attendre quelque temps encore, jusqu’à ce que le malaise général fût devenu plus pénible et que le sentiment de l’instabilité des choses se fût accentué. Si lui seul eût agi, la prolongation de son Consulat eût été ajournée. Mais telles n’étaient pas les vues de ses partisans et de ses flatteurs.

Pendant qu’il était allé à la Malmaison, on convoqua une séance extraordinaire du Conseil d’État. Rœderer prit la parole et proposa un projet d’arrêté qui soumettait au peuple, non seulement la question du Consulat à vie, mais celle de la succession ou même, dit -on, celle de l’hérédité. L’arrêté passa au Conseil et fut porté à l’approbation de Bonaparte. Mais au grand étonnement des auteurs du projet, le Premier Consul se mit dans une