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des troupes de terre, tant coloniales que métropolitaines. Les avantages de ce système sont nombreux : Le rattachement facilite le recrutement, et par conséquent la relève, des officiers et des hommes de troupe; il permet la constitution, sans difficultés, de corps expéditionnaires nombreux, pour la formation desquels, jusqu’à présent, la Marine a dû toujours recourir à la Guerre ; il donne aux élémens prématurément fatigués de l’armée coloniale les moyens de se reposer et de se refaire, sans être forcés d’interrompre leur carrière ; il assure une marche plus régulière à l’avancement; il diminue les attributions du ministère de la Marine, et les événemens récens ont prouvé que sa tâche était lourde; il faut éviter de le distraire de la reconstitution de nos forces navales, but constant de ses efforts.

Tous ces avantages généraux sont fort sérieux, mais, à notre avis, le principal dont nous n’avons pas encore parlé, est de procurer à notre armée les débouchés qui lui font aujourd’hui tout à fait défaut et qui lui sont cependant indispensables, comme nous allons chercher à le prouver.

Bon nombre de jeunes gens, et parfois des mieux doués, de nature ardente et de tempérament exalté, embrassent la carrière des armes sous l’impulsion d’un besoin d’aventures que ne peut satisfaire la monotone existence de la plupart des calmes garnisons de France. Bientôt, ces jeunes gens se laissent aller à des écarts de conduite plus ou moins graves qui compromettent leur carrière et souvent même brisent leur avenir, privant en même temps le pays de serviteurs qui auraient pu être utiles. Ces faits regrettables sont d’autant plus nombreux que les périodes de paix sont plus longues. À ces natures ardentes qui ne peuvent apaiser leur soif d’activité dans les travaux du temps de paix, il faut une soupape, que leur procurent les hasards, les émotions, les jouissances de la vie de campagne. Il y a un demi-siècle, l’armée de terre trouvait cette soupape dans l’Algérie; aujourd’hui elle ne la rencontre que dans les expéditions coloniales.

Ces expéditions complètent l’instruction des jeunes officiers, et sont une excellente épreuve pour leur caractère et leur énergie ; il est donc désirable de faire subir cette épreuve au plus grand nombre possible.

En revanche, les officiers d’un grade élevé, déjà passés par les colonies, non seulement n’ont plus rien à y apprendre, mais s’exposent même, en continuant à y conduire de petites colonnes