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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 153.djvu/712

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comme un véritable suc gastrique. Est-ce réellement une sécrétion particulière, c’est-à-dire un fait d’activité vitale, comme le veut M. Greenwood, ou une osmose élective, c’est-à-dire un fait physique, comme le pense M. Le Dantec ? À mesure qu’on approfondit, les problèmes nouveaux et les occasions de recherches jaillissent à chaque instant.

La mise en jeu de ces deux propriétés est, comme nous l’avons vu, provoquée par une impression que le phagocyte subit de la part du corps qu’il approche et qu’il va dévorer ou qu’il fuit au contraire. Cette impression en rapport avec la nature chimique de l’excitant est un chimiotactisme. Et cette question, comme l’on pense bien, a donné lieu à une infinité de recherches.

Celles de MM. Massart et Bordet sont des plus intéressantes. Ils ont constaté, en appliquant l’ingénieux procédé de M. Pfeffer, que cette espèce d’attraction (ou de répulsion, dans d’autres cas) était due à la diffusion de produits solubles émanés du corps excitant, du microbe par exemple, et qui vont atteindre le phagocyte. Dans un tube capillaire d’une extrême finesse, on introduit une culture de bactéries ; dans un autre, seulement les produits solubles de cette culture, de l’eau dans un troisième, et ces trois tubes sont insérés, sans dommage d’ailleurs, dans un réservoir naturel de lymphe, par exemple sous la peau d’une grenouille. On voit bientôt les leucocytes accourir en foule et se presser de plus en plus nombreux autour de l’orifice et jusque dans l’intérieur des deux premiers tubes, tandis que le troisième est absolument déserté. On a pu étudier ainsi l’action exercée par les différens bacilles, bactéries, staphylocoques, sur les phagocytes, attraction qui est la cause de leur mise en marche et le prélude de leur rencontre. En général, selon M. Massart, les races peu virulentes attirent les phagocytes avec énergie ; les races très virulentes les laissent indifférens ou les repoussent.

Enfin, si l’on envisage les conséquences de ces propriétés, on a vu qu’elles se rapportaient à trois ordres de faits. La phagocytose a un rôle très important dans le fonctionnement normal de l’organisme ; dans la disparition des organes larvaires ; et enfin dans la défense de l’organisme contre les microbes. Nous n’avons pu qu’esquisser à peine les conditions de cette lutte des phagocytes contre les tissus vivans et contre les microbes plus ou moins virulens.


A. DASTRE.