Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 154.djvu/847

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

blanches, dont il avait oublié, dans son émotion d’enfant, de faire l’emploi convenu.

La police a remarqué que les maisons de jeu ne font plus leurs frais et disparaissent faute de « pontes. » Dans tel tripot épié par les agens de la sûreté, « en observation » suivant le langage technique, la tenancière finissait par rester en tête-en-tête avec les « indicateurs » de la préfecture. Ce fait tient un peu au développement des casinos de Belgique, mais surtout à l’extension du pari mutuel en France. Les commissaires des jeux retrouvent d’anciennes connaissances parmi les diverses catégories de parieurs, qui, après tout, gagnent à changer de théâtre, puisqu’ils sont plus aérés et moins floués. Types fugaces, un jour au pesage, puis au pavillon, ils glissent à la pelouse et s’éclipsent parfois tout à fait, durant quelque temps, pour surgir à nouveau après une réussite.

Il convient de reconnaître que la jurisprudence et l’opinion ont, en ce domaine du pari, légèrement flotté : on proscrivait, il y a vingt ans, comme immorales, les roulottes où se perpétrait le premier pari mutuel, importé d’Autriche ; et l’on supprimait un peu plus tard, pour le même motif, le pari à la cote.

Jusqu’en 1887, ce fut l’âge d’or des bookmakers. L’administration des suburbains exigeait deux le paiement d’une taxe, sous prétexte de sélectionner les bons d’avec les mauvais et aussi parce qu’elle trouvait là une recette, nécessaire, disait-elle, aux hippodromes qui ne peuvent disposer que des plus mauvais jours de la semaine. Les grandes sociétés, comme Longchamp, ignoraient officiellement l’existence de ces « donneurs » de chevaux qui payaient simplement leur entrée. Rangés en ligne, juchés sur un tabouret, à côté du piquet qui leur servait à afficher l’indication des cotes et dans lequel ils emmanchaient un parapluie, ils opéraient à leur guise. Ce matériel sommaire leur était fourni, moyennant 10 ou 20 francs chaque dimanche, par un nommé Regimbault, qui devait réaliser de fructueux bénéfices, puisqu’il y eut jusqu’à 100 bookmakers au pesage et plusieurs centaines sur la pelouse, mais qui, en échange du monopole de fait dont il se trouvait investi, se chargeait de maintenir un certain ordre dans cette bourse foraine des paris.

Il y avait un peu de tout en effet parmi ces industriels de nationalité et de domicile indécis, vociférant à qui mieux mieux : « Voyez la cote, la cote ! Qui veut Chambertin ? Amanda je donne !