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Cependant on regretta même d’avoir été si loin dans la quatrième séance plénière de la commission (7 juillet) ! L’Angleterre avait réfléchi, paraît-il ; sir Julien Pauncefote passa d’un pôle à l’autre et tendit la main au docteur Zorn. On maintint le projet russe en substituant, sans doute par élégance grammaticale, les mots « en tant que les circonstances le permettront » à la phrase « en tant que les circonstances l’admettraient. »

Je rappelle que le projet russe instituait, parallèlement à la médiation, des commissions internationales d’enquête. C’est là seulement que le gouvernement impérial avait inscrit le principe d’un engagement à prendre par les États signataires de la Convention. Il était facile de prévoir que les adversaires du projet allaient concentrer leurs forces sur ce point essentiel. C’est ce qu’ils ne manquèrent pas de faire, et plusieurs États de second ordre, affectant de croire que cette partie de la résolution les atteignait particulièrement dans leur indépendance, se laissèrent pousser volontiers ou se jetèrent d’eux-mêmes à l’avant-garde. C’est ainsi qu’aux deux séances du comité d’examen où ce débat fut porté (18 et 19 juillet) se présentèrent, outre le baron de Bildt (Suède et Norvège) et M. Eyschen (Luxembourg), le comte de Macedo (Portugal), MM. E. Rolin, quatrième délégué du roi de Siam, Beldiman et Papiniu (Roumanie), Delyannis (Grèce), Miyatovitch et Veljkovitch (Serbie), Stancioff (Bulgarie). La mêlée fut, sur-le-champ, ardente et confuse. MM. Holls (Etats-Unis) et Lammasch (Autriche-Hongrie) résumèrent clairement la volonté des opposans : « Il vaudrait mieux se borner à recommander les commissions d’enquête. »

M. de Martens défendit la proposition russe sans raideur, avec beaucoup de compétence et d’habileté, sans paraître toutefois vouloir imposer ce qu’il savait ne pas pouvoir obtenir. Les uns disaient, comme MM. Rolin et Odier : « La commission d’enquête conduit à l’arbitrage obligatoire ; » d’autres, comme M. Asser : « Elle empêchera l’arbitrage ; » les uns, comme M. Veljkovitch : « Cette mesure sera funeste aux petites puissances ; » d’autres, comme M. Stancioff : « Elle est tout à l’avantage des petites puissances. » Le plénipotentiaire russe répondait à ces divers assaillans : le but des commissions d’enquête n’est ni de provoquer un arbitrage ni de l’empêcher ; elles ont une existence parfaitement distincte et leur objet se borne à constater par un commun accord les causes matérielles d’un conflit. Quant aux conclusions finales