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voulu prévenir se produisait sans la participation du comte de Sainte-Aulaire. Dès le 25 février, Clausel de Coussergues, cédant aux instances de Villèle, s’était décidé à retirer son accusation contre Decazes, et c’est à la lettre qu’il avait écrite au président de la Chambre, à cet effet, que le roi faisait allusion dans celle qu’on vient de lire. Comme conséquence de l’abandon d’une motion aussi blessante qu’insensée et dans une pensée d’apaisement, l’épithète de « calomniateur, » dont s’était servi le comte de Sainte-Aulaire en répondant à Clausel de Coussergues, n’avait pas été mentionnée dans le procès-verbal de la séance. Mais cette suppression d’un mot de justice et de colère fut relevée le 1er mars, au nom de la gauche, par Benjamin Constant. Un débat tumultueux s’ensuivit, et un vote ordonna que le mot supprimé dans le procès-verbal y serait rétabli.

À cette décision, prise surtout contre lui, Clausel de Coussergues répondit en déclarant qu’il maintenait sa proposition et qu’il saurait bien la justifier. C’était un homme violent et exalté. Dans son discours, il qualifia Decazes de chef des révolutionnaires de France. Rappelé à l’ordre pour ce nouvel outrage, il eut cependant la satisfaction de constater qu’aucun des ministres présens, dont plusieurs avaient été les collègues de Decazes, ne prenait sa défense, et que le comte de Sainte-Aulaire, engagé par la promesse qu’il avait faite au roi, restait à son banc. Déjà blessé de n’avoir pas été défendu lorsque la proposition avait été déposée, Decazes devait l’être plus encore cette fois, et on verra bientôt en quels termes amers il exprimait son légitime ressentiment.

Le 1er mars, le roi, au moment où il écrivait, ne savait rien de cet incident. Il n’en est pas question dans sa lettre, non moins pleine d’effusion que les précédentes. En revanche, il se plaisait à confier à Decazes qu’il avait été enchanté de son beau-père. Pour récompenser ce dernier, il lui avait lu en anglais la belle missive du roi d’Angleterre. Il l’avait lue aussi au marquis de La Tour-Maubourg « que la phrase de la fin a bien attendri. C’est, ma foi, un excellent homme. Le beau-père m’a raconté ce qu’a fait Dubois. Les larmes m’en sont venues aux yeux. Que pourrais-je faire pour reconnaître un pareil dévouement ? »

Cependant, il attendait avec impatience une « lettre de son fils. » Il l’espérait pour le lendemain, ou il ne répondait pas de son obéissance, c’est-à-dire que, s’il restait sans nouvelles, il expédierait ce qu’il avait écrit depuis quatre jours : « Tout ce fatras