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à l’abri de la pointe de Vallière et se sont garantis tout d’abord des grosses mers en construisant de leurs mains une grossière digue en moellons bruts. La situation a été depuis améliorée, et l’abri des chaloupes et des canots de pêche est aujourd’hui très bien assuré par une jetée d’une centaine de mètres. La conche de Saint-Georges présente une plage doucement arrondie, dont le sable est d’une merveilleuse finesse. Le petit bourg en façade sur la mer a été reconstruit à neuf depuis vingt-cinq ans. Adossé à des collines de pins, c’est aujourd’hui un élégant village de chalets à la mode, très fréquenté par les touristes et les baigneurs.

Le rocher au pied duquel se développe la petite ville de Royan occupe, à l’entrée même de la Gironde, une remarquable position stratégique. Dès les temps anciens, un castrum, et, au moyen âge, un château fort, commandaient le passage du fleuve. Peut-être Royan a-t-il remplacé l’ancien Novioregum de l’époque gallo-romaine ; il était relié alors à Saintes par une route stratégique, dont on peut lire les diverses étapes à travers les marais de la Seudre, dans l’Itinéraire d’Antonin. La ville fut démantelée sous Louis XIII et la petite jetée qui couvrait le port complètement détruite. Royan fut alors à peu près ruiné. Mais l’embouchure d’un fleuve comme la Gironde ne pouvait être longtemps abandonnée ; et, après le siège de 1622, les pêcheurs et les pilotes construisirent eux-mêmes une palissade qui leur servit tant bien que mal d’abri. Cet ouvrage provisoire fut bientôt remplacé par une jetée de 150 mètres, enracinée à la falaise et derrière laquelle se développent 400 mètres de quai. Royan n’est encore qu’un port d’échouage, qui ne satisfait pas au désir légitime du pilotage. Les dangers que présente l’entrée de la Gironde par certains temps nécessitent, en effet, la création d’un port en eau profonde, pouvant permettre aux pilotes de tenir constamment leurs chaloupes à flot et de sortir à toute heure de la marée pour secourir ou remorquer les bâtimens en péril ou un peu désemparés sur les passes du fleuve. C’est dans ce dessein qu’on avait commencé, il y a une douzaine d’années, la construction de deux grandes jetées en mer, devant transformer l’anse du Fossillon en un vaste bassin accessible par tous les temps. Les travaux ont été malheureusement arrêtés, et la sentinelle avancée de la Gironde doit se contenter, pour longtemps peut-être, de son modeste petit port, dont le mouvement dépasse cependant 30 000 tonnes et ne peut qu’augmenter, grâce aux