rante. Ministrables, sans doute ils le sont, puisque M. Millerand est ministre et que, dans le ministère, ce n’est pas lui qui tient la moindre place, ni qui fait la moindre figure. Voilà ce qui est ineffaçable, et c’est sous cette impression inquiétante et troublante que s’achève l’année 1899. Aucune autre, parmi toutes les précédentes, n’avait donné une accélération aussi redoutable au parti socialiste, et ne l’avait conduit plus près de son but. Ce but, avoué, proclamé aujourd’hui, est la conquête des pouvoirs publics. M. Waldeck-Rousseau n’a même pas laissé à M. Millerand la peine de conquérir le pouvoir ; il le lui a offert spontanément, sous prétexte de l’associer à l’œuvre de défense de la république. Les vieilles traditions d’esprit public subsistent encore dans nos provinces : on y considère toujours le gouvernement comme la barrière vivante et active qui doit nous défendre contre les convoitises des socialistes et les violences des révolutionnaires. Aussi l’effarement et bientôt l’indignation ont-ils été extrêmes, lorsqu’on a vu le gouvernement lui-même s’affilier aux socialistes et aux révolutionnaires. Le gouvernement défend la république, soit ; mais tout le monde commence à se demander qui nous défendra de lui, et c’est une question qu’il est souverainement dangereux de laisser en suspens dans les esprits. Espérons que l’année 1900 ne tardera pas à la résoudre. Le ministère Waldeck-Rousseau n’est que la mauvaise suite de l’affaire Dreyfus : il est le dernier témoignage du désordre mental et moral qu’elle avait mis presque partout. Puisse 1899 emporter dans le passé toutes ces émotions, ces agitations, ces disputes, ces fausses alarmes au sujet d’un danger imaginaire, et ces prétendus remèdes qui entretiennent et aggravent le mal au lieu de le guérir ! L’année de l’Exposition universelle doit appartenir à l’apaisement : ce n’est pas le ministère actuel qui nous le donnera.
Nous avons fait seulement mention, il y a quinze jours, du remarquable discours que M. le comte de Bulow a prononcé au Reichstag allemand. Nous parlions alors des rapports de l’Angleterre avec les autres puissances, et, après la manière triomphante dont M. Chamberlain en avait parlé lui-même, il était impossible de ne pas noter le ton sensiblement plus réservé que M. Mac Kinley, à Washington et M. de Bulow, à Berlin, avaient mis à traiter le même sujet. Mais ce n’était là qu’un détail dans le discours du ministre allemand, et nous devons y revenir.
Il faut remonter au temps du prince de Bismarck pour retrouver un exposé aussi vaste de la politique impériale, fait avec autant de