suivans, aucun avis, aucune explication à transmettre. Leur trouble ensuite fut celui de tout le monde, quand ils virent la capitale en feu, l’état de siège proclamé, l’armée en déroute et un état d’anarchie dont les menaces ne respectaient personne. Enfin leur position devint extrêmement délicate, lorsque, après s’être retiré de Saint-Cloud, le roi s’arrêta à Rambouillet, rappelant autour de lui ce qu’il croyait garder de troupes fidèles et paraissant disposé à rentrer en lutte, tandis qu’au même moment, à Paris, le duc d’Orléans, contraint de sortir de la retraite où il s’était d’abord renfermé, arrivait pour recevoir du parlement l’investiture de la lieutenance générale du royaume : que devaient-ils faire, si le roi, pour attester qu’il se croyait toujours chef de l’Etat, les appelait auprès de lui ?
En principe, la question n’était pas douteuse. D’après toutes les traditions diplomatiques, c’est auprès du souverain nominalement et on personne que les agens diplomatiques sont accrédités, et c’est ainsi que, quand un roi meurt, toutes les lettres de créance doivent être renouvelées. On n’était pas encore arrivé à la distinction pratique que nos fréquentes révolutions nous ont appris depuis lors à faire entre le souverain et l’Etat, et qui a permis à des ambassadeurs, quand tout croulait autour d’eux, de rester en fonction et en relations au moins officieuses avec tous les gouvernemens de fait improvisés par la rue ou imposés par le sabre. Que faire donc ? Quelle conduite tenir ? Quel parti prendre ? Fallait-il attendre l’appel ou le devancer ? Convenait-il de s’y rendre, si enfin il arrivait ? Le télégraphe ne rendait pas alors aux diplomates le service, plus utile pour leur personne que pour l’intérêt public, de mettre, par une instruction demandée à temps, et souvent donnée au hasard, leur responsabilité à couvert. Cependant il y avait tel parti à prendre sur l’heure, soit de rejoindre la royauté fugitive, soit de l’abandonner à son sort, qui, pour l’effet moral et pour l’apparence, semblerait préjuger une résolution définitive. Faire cortège au roi et le suivre, s’il le fallait, jusqu’à un lieu d’exil, c’était déclarer que la France s’était mise au ban de l’Europe. Rester après lui à Paris, c’était reconnaître la vacance du trône.
Le cas était des plus embarrassans : heureusement pour ces diplomates en peine, et je crois aussi pour tout le monde, d’abord l’invitation n’arriva pas, et rien n’atteste mieux l’état de trouble moral qui accompagne et précipite toujours les déroutes. Une